15 octobre 2010, journal de 13 heures de France 2. Anecdotique pour les uns, symptomatique pour les autres, le pet buccal de la 29ème fortune de France et le silence feutré qui s'ensuivit invitent l'amateur de rap en français à poser un instant le casque pour s'interroger frontalement. "11'30 contre les lois racistes", "Une saison blanche et sèche", "Qui ça étonne encore ?" ou "La gueule de l'emploi" : tout n'a-t-il pas été déjà rappé et re-rappé en matière de racisme, sur petites comme sur grandes ondes ? Quelle est la réelle efficacité du geste rap ? Soulage-t-il davantage l'émetteur qu'il n'impacte le récepteur ? Est-il d'ailleurs reçu par les bonnes personnes ? Ne tourne-t-il pas en rond, à l'entre soi ? Au terme de quatre décennies de cris vains, ces questions semblent légitimes pour qui entend avancer. D'invectives en annonces du grand soir - du rap de bande-annonce, écrivait tantôt Havoc sur le forum de l'Abcdr -, c'est à se demander si le combat le plus juste ne consisterait pas en un virage à 180°, un changement radical de paradigme qui puiserait dans l'échec d'autres formes d'expression pour en densifier la portée. Au noir désir de la colère substituer la dignité calme, l'humour-tank ou la rhétorique glacée ne suffit visiblement pas, ou plus. Et si un bout de vérité se situait quelque part dans la trop méconnue parabole des oiseaux noirs et des oiseaux blancs de Tierno Bokar, le sage de Bandiagara ?
— Anthokadi