Werenoi a su faire ses armes sur une scène rap déjà bien servie en discours (fantasmés ou non) de grosses sommes, de femmes et de gamos. Sa particularité étant d’amener ces thèmes dans une ambiance musicale crapuleuse, un ton nonchalant et des schémas lyricaux qui se retiennent, notamment par la répétition de ses fins de mots. Les sons bruts, parfois mal mixés et partagés sur Telegram ont fait son charme et sa patte. Avec Pyramide sorti en février 2024, il a continué de servir ce cocktail de thématiques qu’on lui reconnaît : escorts, argent et grosses voitures. Le tout, en sachant porter le narratif par une plume capable d’évoquer des scénarios imagés avec une tonalité qui gronde, incarnés par son personnage stoïque. Pourtant, Pyramide 2, sorti en octobre, laisse une impression d’étirement inutile d’une œuvre qui se suffisait à elle-même. 

Si ce volume se présente comme une extension directe de Pyramide, force est de constater qu’elle n’en apporte ni la profondeur ni l’impulsivité. Le sentiment prédominant est celui d’une répétition : la même recette est appliquée, mais en fonctionnant moins bien. Une sorte de présentation générique de ce qu’il est capable de faire sur une structure comptant peu de reliefs. Les morceaux semblent glisser les uns sur les autres sans jamais captiver pleinement, à l’exception notable de trois titres : « Emelyne », « Malus » et « Alpha ». Ce dernier qui se veut être l’introduction de l’opus se démarque particulièrement par une introspection explicite, rare dans la discographie de Werenoi. Il laisse entrevoir ses fêlures : « Des fois j’ai mal, la haine de fou, j’sais même pas pourquoi j’crois que c’est l’œil » ; « trop d’émotions, ils vont flipper si j’explose » : une lueur de profondeur qui fait regretter que cet élan n’ait pas été davantage tenu sur l’ensemble de l’album.  Si les ingrédients de base sont toujours présents, la sauce manque d’être « remuée » pour offrir une saveur lors de l’écoute. Là où Werenoi excelle à nous immerger dans ses histoires parfois dépravées, angoissantes ou bien dangereuses, il semble ici s’être contenté d’effleurer le contenu sans y apporter d’épaisseur. 

Au final, Pyramide 2 ressemble davantage à une extension forcée qu’à ce que devrait être l’évolution d’un projet dans la carrière carrée que le rappeur se construit. Bien que le disque contienne quelques éclats bruts, ces impacts ne suffisent pas à convaincre de sa réelle nécessité. Un phénomène de ce rap-jeu où art et marketing se confondent un peu trop souvent et où l’obsession des rééditions, des demi-éditions ou encore de « faux inachevés » finissent par diluer la proposition initiale. – Inès