Harmonie Mac Miller – « Everybody »
Sur ces derniers disques, une des orientations musicales de Mac Miller présageait quelque chose de plus épuré, plus émotionnel, plus orchestral. Une admiration assumée pour les arrangements minutieux dans des canons plus pop. La musique populaire est parfois perçue comme dépourvue de sentiments sincères, mais dans son approche, l’auteur de Swimming était dans une recherche constante des progressions harmonieuses. Dans cet esprit, un titre comme « 2009 » était un exemple parfait. Une composition équilibrée. Des auteurs tous très divers. Aja Grant, du groupe Phony Ppl, sur la synchronisation des tous les violons. Eric G, producteur pour l’écurie Jamla Records, label de 9th Wonder étiqueté boom-bap. L’utilisation d’un sample de la chanteuse Chanté Moore (« Chanté’s Got a Man », 1999), un morceau produit par un duo légendaire, Jimmy Jam et Terry Lewis, un binôme connu et reconnu pour la précision technique des enregistrements et son sens de l’innovation. Et en dernier lieu, Jon Brion, un musicien savant qui se permettait d’ajouter sa petite touche : un vibraphone. Dans cette formation aux allures de grande soirée au Carnegie Hall, Malcolm James McCormick – son vrai nom – avait une connaissance exacte de son emplacement : au centre, vulnérable et transparent dans ses agitations, entouré par des âmes passionnées, toutes poussées par le mouvement de l’avant. Circles est la dernière note d’un artiste parti trop tôt, un auteur à la recherche de son épanouissement personnel dans chacune de ses lubies musicales. La prouesse du titre « Everybody » est de se baser sur la déconstruction et le réarrangement. Écrite à l’origine par Arthur Lee, fondateur du groupe rock Love, la première version, « Everybody’s Gotta Live » (1972), est plus électrique et plus brute. Elle respire d’elle-même et est imprégnée d’une effluve contre-culturelle et du fantôme de Jimi Hendrix. Et dans cet exercice très pop – voire très YouTube – de faire des reprises, le natif de Pittsburgh déploie à la fois sa curiosité musicale et son obsession naissante des accords justes. Dépouillée de leur verve, le piano, la basse et la batterie sont les motifs principaux. Garde-fou de cette œuvre délicate, Jon Brion s’est attaché à sélectionner, accorder sans jamais dénaturer : « J’essayais de trouver le moyen de le changer le moins possible » , déclare-t-il dans la magazine Vulture. « Everybody » fait partie des titres sur lesquels il n’a quasiment rien eu à faire. Une preuve de son évolution permanente. Les dernières bribes d’un esprit toujours en réflexion. Un au revoir par la grande porte, cette fois-ci. — ShawnPucc