Lettre

Shurik'N

("Où je vis", 1998)

Plus qu’une lettre, le testament d’un grand-père à son petit-fils. Shurik’N pratique l’adieu viril et la transmission sobre. Education, persévérance, sens de l’honneur, les piliers sont appuyés. Entre eux, cette fine tablette de Lindt, hommage à l’être qui les relie : "Il te dira que le sang est le même pour tous, seules les couleurs changent ; on finit de la même façon : on tend la main aux anges."

Chez moi

Casey

("Tragédie d'une trajectoire", 2006)

L’amazone point "Fr", son mental de Cyparis, ses mots clairs sur la colère ambiguë d’une prod de Laloo, édifie le métropolitain sur l’envers du paradis martiniquais. Les plages à touristes, elle les arpenterait volontiers en treillis. Les noix de cocos feraient de bons projectiles, et ceux qui comme elle ont lu, étudié et surtout foulé le sol de ce bout de Caraïbe ne peuvent qu’en revenir d’"humeur palestinienne", ainsi que le suggèrent les couleurs panarabes visibles entre deux portes dans le clip de Chris Macari, à moins qu'il ne s'agisse de celles du mouvement indépendantiste martiniquais. Lire l'interview de Casey (avril 2006)

Qu'est-ce qui fait marcher les sages

Les Sages Poètes de la Rue

("Qu'est-ce qui fait marcher les sages", 1995)

'Qu'est-ce qui fait marcher les sages' n'est qu'une facette de l'esprit du trio de Boulogne. Mais ce morceau symbole du premier album donnait déjà le ton : Zoxea débordait de charisme et de flow, Dany Dan jouait l'éternel rimeur et "tard le soir traîneur" quant à Melopheelo il respirait la coolitude. Et les Sages Po’ ont beaucoup trop marqué le rap français de ces quinze dernières années pour ne pas figurer dans cette sélection. Justice est donc faite. Lire l'interview de Dany Dan (novembre 2008)

L'ombre sur la mesure

La Rumeur

("L'ombre sur la mesure", 2002)

Particulièrement imagé, riche en assonances et en références, ce morceau extrait de l'album éponyme donne le ton. Avec Hamé et Ekoué dans le rôle des porte-drapeaux de l'auto-défini "rap de fils d'immigrés", fascinés par l'univers sombre de la nuit. Un sommet où les ombres longent les trottoirs, pleines de pensées obscures, violences soudaines et désillusions.Lire l'interview de La Rumeur (mai 2007)

Le bitume avec une plume

Booba

("Temps Mort", 2002)

Télescopage de sonorités, puzzle de mots et de pensées, le caniveau qui côtoie le 7e Ciel... A chaque coin de phrase, des images apparaissent : ici une plume gigantesque trempée dans la mer, là une Marianne à quatre pattes criant de douleur sous son bonnet phrygien - l'ensemble survolé par un missile estampillé 45 Scientific. Tout Booba est dans ce morceau qu'on redécouvre à chaque écoute ; la preuve définitive qu'on peut faire des battes avec de la sciure.

Sans rémission

Fonky Family

("Si Dieu veut... Inch Allah", 1997)

Quatre impertinents de plus faisant face aux conséquences... Quand la FF débarque sur le rap français en 1997, un violent coup de mistral balaie les radios et les walkmen. En concert, 'Sans rémission' fait hurler les foules. Aujourd'hui, l'énergie un brin naïve de ces révolutionnaires de studio fait franchement défaut au paysage rapologique hexagonal.

2 issues

Kery James

("Si c'était à refaire", 2001)

On pensait sa carrière de rappeur terminée, mais c'est bien sa voix qui, en 2001, envahit à nouveau les ondes des radios auto-proclamées spécialistes ès-rap. Kery l'ex-sanguin, traumatisé par la mort de son ami Las Montana, revient apaisé par sa conversion à l'Islam et jette l'habit de bandit à la poubelle, suivi par le gotha du rap français.

Un dernier jour sur Terre

La Cliqua

("La Cliqua", 1999)

Le thème de "Candyman", les visions apocalyptiques de Rocca et du Dad, l'explosion finale... 'Un Dernier Jour sur Terre' n'est pas franchement représentatif de la discographie de La Cliqua, mais le morceau fait assurément son effet. Ca ne console pas de l'absence injustifiable de 'Rap Contact', mais c'est toujours ça de pris.

Des durs, des boss... des dombis !

Fabe

("Le fond et la forme", 1997)

'Des durs, des boss... des dombis !' égratigne l’absence d’authenticité des MCs. Comprendre par authenticité être soi-même et non un personnage. Conclusion de l’impertinent : "c’est tellement bas que pour en parler, il faudrait que je me fasse mal au dos". 4 ans plus tard, certains avaient toujours cette "rime de bâtard" en travers de la gorge.

Les bidons veulent le guidon

Time Bomb

("Pheno - No Mixtape Vol. 1", 1997)

Booba, Ali, Oxmo, Ill, Cass'...Tenter de les réunir sur un titre en 2009 relèverait du pur fantasme. Pourtant, il fut un temps où cette pléiade de super-MC's rappaient non seulement ensemble mais officiaient tous fièrement sous la bannière Time Bomb. Une époque bénie où tout restait encore à faire et durant laquelle le public rap français hallucinait devant ces voltigeurs aux styles révolutionnaires.

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