Primero, du beau au coeur
« Ces quelques tracks faut que tu les prenne comme un petit caprice, une pommade sur tes cicatrices ». Pour clôturer son nouvel EP, Primero résume ce qu’il sait faire de mieux depuis son envol en solo en 2020 : une introspection qui accorde de l’importance au son et aux mots. Il faut dire que depuis quatre ans, le rappeur de L’Or Du Commun enchaîne les sorties de qualité, pleines d’assurances dans leurs choix musicaux, mais aussi de fragilités dans leurs mots, comme il le détaillait dans une longue conversation avec l’Abcdr du Son l’an dernier.
Après plusieurs mois de silence total en 2024, l’annonce du retour de Primero avait alors de quoi intriguer. Pensé comme une capsule de pensées entièrement rappée (le chant est présent seulement sur le dernier morceau) Plaine des Asphodèles voit Primero observer avec succès ce qui l’anime de l’intérieur, tout en jetant un œil vers l’extérieur. Un changement constant de point de vue qui fait la force de cet EP, autant porté sur les émotions du Belge (“J’suis dehors un peu khabat, dans une tire avec les sièges qu’on peut rabattre. Qui pourra aider mon cœur à battre ?”) que sur le monde qui l’entoure (“On a transformé des terres libres en drapeau. Tue, ils te diront bravo”, “C’est pas juste avec mes chansons ou celles de Zaho de Sagazan que l’on reconstruira Gaza”) sur des productions instrumentales pleines de pianos, guitares, violons, comme pour appuyer sur le côté humain et intime de sa musique.
En observant le monde mais aussi ses émotions avec la même sensibilité que sur Fragments, Primero rappelle finalement avec Plaine des Asphodèles qu’il sait aussi bien rapper que se raconter, tout en évoluant artistiquement. Une musique encore plus précise et personnelle, qui remplit finalement sa mission première : réconforter celui qui l’écoute, le temps d’un trajet plein de réflexions.