Hatrize continue son itinéraire clandestin
Dans un brûlot de cinq titres sorti fin 2018, Hatrize chantait ce monde dans lequel de plus en plus de citoyens ont l’impression d’être devenu des passagers clandestins. Pas de scansion abruptement politique chez ce lyonnais, qui raconte le monde comme Kathryn Bigelow met en scène Strange Days. Plutôt celle de l’émeute, de corps étrangers qui couvent tant ils ont tout appris dans le conflit, et d’un romantisme dissolu dans une pluie d’écrans. Déraper pour que le sol se réchauffe, se réjouir quand le monde flippe, et ne correspondre à rien sauf à des signalements lorsque ça traîne le soir, voilà le monde d’Hatrize. Fondu dans des refrains et ponts autotunés au vibrato pixelisé, trempé dans un flot calé comme un ressac et à la rythmique de proclamation d’indépendance, « Littoral » est le premier titre que sort le rappeur depuis Nulle Part où le silence. Et comme ses prédécesseurs, il met, au milieu de tout, ceux qui ne sont au centre de rien. Œil du cyclone, épicentre invisible, et rap de guerilla d’usure. Entamée aujourd’hui, et qui est partie pour durer au moins tout le siècle. Parce qu’en 2018, Hatrize l’avait dit : « il termine les phrases que le futur commence ». Il reste à l’écrire depuis ce maquis électrosensible, armé de brouilleur d’ondes. Parce que les menaces les plus dangereuses sont les moins visibles.