Bruno Mars, Sexyy Red : Fat Juicy & Pschitt

Peu d’artistes au monde incarnent autant la stabilité que Bruno Mars, qui collectionne les numéro 1 au Billboard avec une régularité qui force le respect. Pas fatigué après 15 ans de carrière, le chanteur originaire d’Hawaii a dans le regard ce vide séduisant, celui que provoque la coke sans gluten prescrite par les médecins californiens, laquelle d’après la rumeur donnerait la jeunesse éternelle à l’heureux consommateur. Ces derniers mois, c’est un doublé de tubes imparable qu’a offert l’ami Bruno aux centres commerciaux du monde entier : la ballade soft rock « Die With A Smile » avec Lady Gaga, et le phénomène « APT » avec Rosé, échappée de Blackpink. Le 24 janvier dernier, Bruno Mars invite les deux chanteuses à sabrer le champagne dans le clip de « Fat Juicy & Wet », son nouveau single en forme de victory lap sexy.

Et pour cette victoire, Bruno a décidé de se faire plaisir, et de faire fi des bonne manières. The Stereotypes, l’équipe de producteurs responsable de nombreux succès du chanteur (dont le classique de mariage « 24K Magic ») fait ce qu’elle sait faire de mieux : passer au gant de crin un sous-genre ou une tendance musicale pour la rendre la plus lisse possible, quitte à la dévitaliser largement. Ici c’est le son ratchet de la côte ouest qui en en fait les frais, pour une caricature beauf de l’héritage de DJ Mustard. Muse du jour de notre héros, Sexyy Red enchaine les rimes trashs dont elle a le secret, l’emballage et le contexte n’en faisant ressortir qu’une vulgarité vaguement malaisante. En tant qu’incarnations d’une pop « familiale » et grand public, voir Lady Gaga et Rosé bouger la tête sur les ad-libs de la rappeuse aurait pu faire l’effet d’un geste punk grisant. La vacuité du morceau souligne au contraire la fuite en avant d’une industrie pop américaine à qui on a visiblement mis du poison dans la poudre.