Tekitha
Au plus fort de l’épopée Wu-Tang, Tekitha en était la première dame, avec une voix qui drapait de douceur la brutalité sonore du collectif. Longtemps annoncé, jamais sorti, son premier album se profile enfin. Volubile et attachante, cette jeune maman nous a raconté son histoire, de Sacramento à Shaolin.
Abcdr du Son : J’ai toujours imaginé que tu étais originaire de New York, mais en fait pas du tout…
Tekitha : [rires] Non, à l’origine je viens de Californie. Je suis née et j’ai grandi à Sacramento.
A : Quels souvenirs as-tu de cette époque ?
T : Surtout des souvenirs familiaux avec mon père, ma mère et mon petit frère. Là-bas, je suis vraiment la fille du coin, j’ai beaucoup de proches en Californie, des gens qui m’ont soutenu tout au long de ma carrière. Mes souvenirs, c’est avant tout cette proximité familiale. J’ai été gymnaste pendant une grande partie de mon enfance, de l’âge de 4 ans jusqu’à ma sortie du lycée. Toute ma jeunesse tournait autour de la gym.
A : Tu étais spécialisée dans une discipline particulière ?
T : Je pratiquais toutes les disciplines, comme ce que tu peux voir à la télévision pendant les Jeux Olympiques. Mon entraîneur s’appelait Geza Pozsar, c’était l’ancien chorégraphe de Nadia Comăneci avec Béla Károlyi. A Sacramento, il a crée sa propre école privée de gymnastique. Je m’y suis entraîné dès l’âge de 10 ans.
A : Pourquoi avoir abandonné ? A cause de la musique ?
T : Non. En fait, j’ai senti qu’il n’y avait pas d’avenir pour moi dans la gymnastique. La gym est un sport dominé par les plus jeunes. Dès que tu atteins 16/17 ans, il faut déjà décider si tu veux faire une carrière universitaire ou t’entraîner pour les Jeux Olympiques. Pour ma tranche d’âge, les prochains JO avaient lieu en 1996, et j’aurais eu 20 ans à ce moment-là. Ça n’avait plus vraiment de sens pour moi, alors j’ai dit stop. J’ai poursuivi en faisant du théâtre et de la danse. Ma transition vers la musique n’a du avoir lieu que vers 1995. Je suis entrée en contact avec le Clan peu de temps après.
A : As-tu grandi dans une famille de musiciens ?
T : En fait, oui et non. Du côté de ma mère, ma grand-mère était chanteuse. Elle avait une voix merveilleuse mais elle n’a pas pu faire carrière, même si c’était son souhait. Mon grand-père aussi, du côté de mon père. A cette époque, ils avaient d’autres responsabilités, ils n’avaient pas la liberté d’envisager une carrière dans la musique. Il y avait des préoccupations plus intenses, ne serait-ce que leurs enfants. J’ai un oncle pianiste qui a intégré le conservatoire de San Francisco mais véritablement, dans ma famille, je suis la seule de ma génération à avoir pu faire carrière dans la musique.
A : D’après une interview que j’ai pu lire de toi, c’est la poésie qui t’a mené à l’écriture de chansons…
T : Oui, c’est vrai. Déjà petite, j’écrivais beaucoup de poèmes. C’était pour moi un moyen d’expression quand la parole ne suffisait plus. Écrire, c’était plus facile. Vers 1994, je vivais à Atlanta, et je devais bien avoir 30 ou 40 extraits de poésie dans mon cahier. En les relisant, je me suis dit » Pourquoi pas en faire des chansons ? « . Au lieu de les lire comme des poèmes, je pourrais les chanter. J’ai dit à ma tante Diana « Hé, quand tu reviendras à la maison, je vais te chanter mes chansons ! « . Comme je n’avais jamais chanté jusque là, elle a du me dire quelque chose comme » Ha bon ? » mais j’étais super enthousiaste. A son retour, je lui ai chanté quatre chansons acapella… et elle a fondu en larmes. Elle était là à me dire qu’elle n’avait jamais entendu quelque chose d’aussi beau, que c’était magnifique ! De là, je me suis mis à l’écriture de chansons. J’étais une complète autodidacte : je ne comprenais pas la notion de mesure, je n’avais aucune expérience.
A : Tu te souviens de tes premiers textes ?
T : Oh mon Dieu non. J’aimerais tellement m’en rappeler mais c’est impossible ! Quand j’ai quitté Atlanta pour New York, l’un des mes cartons a été perdu en route pendant le déménagement. Il y avait la moitié des cahiers à l’intérieur. Tout a été perdu. Ça m’a un peu cassé le moral mais pas longtemps. Quelques semaines sont passées, et puis j’ai fini par me dire qu’en fait, je savais toujours écrire [rires].
A : Que faisais-tu à Atlanta à cette période ?
T : J’étais venu pour trouver une école où je pourrais apprendre l’écriture de théâtre. C’était mon projet initial.
A : Tu étais fan de hip-hop avant le début de l’aventure Wu-Tang ?
T : Ouais, j’ai grandi avec Slick Rick, Ice Cube, NWA… J’étais une grande fan de Slick Rick, j’écoutais tout ce qu’il sortait. Je l’adorais. C’était mon pote ! [rires] Quand le Clan est arrivé, j’étais à Atlanta. Je n’étais pas à fond sur eux mais j’aimais vraiment ce qu’ils faisaient. Je me disais « OK, ça c’est de la musique« . Déjà à cette époque, je savais qu’eux et moi, on parlait le même langage.
A : Tu as souvenirs des premiers titres que tu as entendus d’eux ?
T : Le premier titre… [elle réfléchit]… ça devait être ‘C.R.E.A.M.’. Je ne me rappelle plus du jour exact, par contre. Tu me fais aller loin dans mes souvenirs [rires]. En fait, j’avais entendu le morceau dans la voiture d’un ami. Il avait une cassette, je lui ai demandé qui c’était, il m’a répondu « C’est le Wu-Tang Clan« . Moi : « Qui ça ? Ha ouais c’était cool, j’adore !« . Ça a été le point de départ. Il y a bien longtemps.
A : Comment as-tu rencontré RZA ?
T : Alors, voilà l’histoire : quand j’ai commencé à vouloir faire de la musique, je vivais à Chicago. J’étais en contact avec une boîte de management, The Kingsley Group, qui bossait dans le sport et le spectacle. Ils m’ont fait venir à Chicago pour me montrer comment on allait travailler ensemble. Dante Perkins, un pote à moi qui faisait escale à Chicago pendant son voyage vers New York, a entendu trois morceaux que je venais d’enregistrer. Moi, je lui avais dit « Tu sais, c’est quelque chose de nouveau pour moi aussi, mais bon, voilà ma musique !« . Il était assez impressionné et m’a dit qu’il connaissait des gens du Wu-Tang. Il pourrait peut-être faire passer ma maquette auprès d’eux. Pour moi, c’était cool, mais je n’y ai pas vraiment repensé après coup. C’était à l’époque où Farrakhan organisait la Million Man March à Washington. Dante a pris ma maquette, direction Washington, où il a rencontré toute l’équipe, dont Tarif Supreme Power, l’un des producteurs exécutifs. Si je ne dis pas de bêtises, le Wu-Tang avait du faire un concert à Washington et ils redescendaient sur Atlanta. Dante a fait écouter la maquette à tout le monde pendant le trajet. Peu de temps après, un représentant du Wu appelé Howard Edward m’a appelé à Chicago. C’est comme ça que ça a commencé. Dante a fait passer la cassette, et ensuite je me suis frayé un chemin dans la hiérarchie.
« J’ai toujours ressenti une grande bienveillance pour le Wu-Tang. Quand j’ai commencé à chanter, je n’arrêtais pas de me dire « Si seulement je pouvais leur apporter un peu de sérénité… » »
A : Tu te rappelles de la première rencontre avec RZA ?
T : Voyons voir… Le Clan enregistrait une émission sur MTV pour la sortie du film High School High. Ils avaient fait un morceau pour la bande originale. C’est Power qui a fait les présentations entre RZA et moi. Je l’ai rencontré en coulisses, il m’a dit » On m’a beaucoup parlé de toi, j’aime bien tes chansons, il faut qu’on travaille ensemble « . Après ça, nos chemins ne se sont plus jamais séparés. On s’est mis au travail peu de temps après cette première rencontre.
A : RZA a la réputation d’être un véritable stratège. Quel était son plan pour toi ?
T : Je me souviens qu’au début, c’est surtout Divine qui intervenait. Son vrai nom est Mitchell Diggs, c’est le grand frère de RZA, il gère une bonne partie des affaires du Clan. Un ou deux mois après mon arrivée, j’enregistrais des collaborations, je chantais mes refrains, mais je bossais aussi sur des titres solo. C’est là que Divine et RZA m’ont convoqué. Ils m’ont dit « Tu as l’opportunité de bâtir une marque, tu n’es pas obligée de te limiter à des refrains, tu devrais créer une entité à ton image. Travaille au sein de cette entité et lance un mouvement à partir de ce que tu crées. » La vision à long terme était une donnée constante.
En 1997, Divine m’a aidé à lancer Wisdom Body Inc., il m’a accompagné à chaque étape : trouver un avocat, établir un plan financier, etc. Donc oui, il avait un plan. Plusieurs années ont passé et je réalise que le projet de RZA était surtout que je sois en position de contrôler ma carrière sans avoir à attendre sur les autres. C’était à moi d’être aux commandes. Ils ont toujours été actifs et proactifs lors de la signature de mes contrats. Quand mon contrat a été signé entre Razor Sharp Records et Epic, ils se sont assuré que je ne me faisais pas abuser. C’était un excellent contrat. L’avocat d’Epic a bien essayé de nous doubler mais Divine a agi comme un bouclier.
A : Te retrouver, si jeune, dans l’un des collectifs les plus importants du hip-hop, c’était une grosse pression ?
T : Oui. D’ailleurs, la personne que j’étais à cette époque était vraiment différente de celle que je suis aujourd’hui. Pour certains, ça ne représente pas grand-chose, mais être dans le Wu-Tang, crois-moi, ça fait beaucoup d’hommes autour de soi. Il y a tous ces hommes, et aussi une poignée de femmes, mais seulement deux d’entre elles – Blue Raspberry et moi – sont là pour travailler. Les autres, elles prennent du bon temps. Tant mieux pour elles d’ailleurs, amusez-vous bien ! Mais pour moi, la vraie pression, c’était de m’assurer que tout le monde comprenne bien que j’étais là pour la musique.
L’autre pression, c’était d’être enfermée dans une case. Un jour, j’aurais bien pu avoir envie d’une chanson légère, fraîche et fantaisiste, mais un Ghostface n’aurait jamais eu envie d’une chanson légère, fraîche et fantaisiste. Lui voulait autre chose, et il en était ainsi. La pression, c’était d’interpréter des chansons à leur façon, mais c’était malgré tout une expérience dynamique. Pour leur défense, je dois dire qu’ils ont fait le nécessaire pour que je me sente à l’aise. Ils m’ont compris très tôt et m’ont traité de manière adéquate. Je n’ai jamais eu d’expérience gênante avec eux car ils avaient une compréhension claire de la personne que j’étais, et ils ont su prendre soin de moi en conséquence.
A : Ils ont du aussi comprendre l’étrangeté pour toi d’être une femme au milieu d’un collectif chargé en testostérone…
T : Ouais [rires]. Pendant les deux premières années, je me retrouvais fréquemment en tête à tête avec l’un d’entre eux. U-God allait par exemple me convoquer pour m’expliquer comment me comporter, comment garder la tête sur les épaules. RZA allait me parler en tête à tête de la façon dont je devais avancer dans le business. D’autres fois, Inspectah Deck demanderait à lire mes textes. Chacun d’entre eux avait un angle bien spécifique pour m’aborder mais ça partait toujours d’un bon sentiment, je me sentais vraiment protégée. Je ne me suis jamais sentie ignorée, pas simplement comme une petite sœur, mais aussi comme une artiste en développement. Il faut se rappeler que j’étais encore une débutante. Jusque là, la vie pour moi s’était résumée à l’athlétisme. Donc tout ça, c’était enrichissant.
Je n’ai vraiment aucun mauvais souvenir de cette période. C’était très stimulant car moi-même, je devais savoir qui j’étais véritablement. Mon franc parler et mon assurance se sont révélés à leur contact, en voyant comment ils géraient leurs affaires. Je suis arrivée toute neuve et j’ai appris comment faire preuve d’autorité tout en restant une femme. Je suis très reconnaissante pour tout ça. Je suis heureuse d’avoir pu grandir tout en conservant mon affiliation avec eux. Ils sont mes frères pour la vie, mais je suis vraiment satisfaite de pouvoir mieux montrer ma personnalité à travers ma musique. Bon, j’ai du rester un peu dans mon coin par moments parce que putain ! Je te garantis que ça faisait un sacré paquet de mecs à gérer. Et il n’y a pas que le Clan, il y a aussi la famille autour. Les amis, les cousins… Là-bas, il faut vraiment bien se connaître soi-même et avoir la tête vissée sur les épaules pour ne pas se faire marcher sur les pieds.
A : A t’entendre, on sent que tu étais particulièrement protégée à l’intérieur du Wu-Tang, mais sur les disques, c’est presque l’inverse : on a l’impression que c’est toi qui les protège. Sur un morceau comme ‘Manchild’, tu ressembles presque à une figure maternelle…
T : C’est très gentil de me dire ça ! Une chose qu’on me répétait beaucoup à l’époque, c’est que j’étais vraiment différente des gens qu’ils pouvaient côtoyer. Pas mal de frères m’ont dit « Tu n’es pas comme les autres femmes que je connais« . Il doit y avoir, je pense, un esprit qui m’entoure. Quelque chose de tendre. Aujourd’hui encore, je suis pleine de naïveté et je suis toujours ultra-compatissante, quitte à ce que ça me joue des tours. Je suis capable de fondre en larmes si je vois quelqu’un se faire maltraiter. Je ne sais pas si c’est dû à leur existence, et je sais bien les difficultés qu’ils ont du affronter en temps que jeunes hommes, mais j’ai toujours ressenti une grande bienveillance pour le Wu-Tang. Quand j’ai commencé à chanter, je n’arrêtais pas de me dire « Si seulement je pouvais leur apporter un peu de sérénité… « . C’est ça mon truc, même aujourd’hui. Je veux partager ma musique et mon énergie pour donner un peu de paix aux autres, leur accorder un peu de répit dans le tourment de leur vie. C’est ça mon objectif, ce n’est pas l’argent ou la gloire. Ma passion, c’est de soulager les autres de leur douleur et leur stress.
A : A la fin des années 90, le Wu-Tang ressemblait à une véritable armée, les albums s’enchaînaient à un gros rythme. Comment travaillais-tu à l’intérieur d’une telle organisation ?
T : Les premiers temps, j’étais supervisée par Tarif Supreme et Howard Edwards. Ils m’envoyaient vers les producteurs, ils m’informaient des projets en cours. Le bruit a couru que je chantais : 4th Disciple allait me faire écouter des sons, Sunz of Man allaient se retrouver en studio, je leur chanterais des refrains que j’avais écrits…Ensuite c’est Killah Priest qui allait me proposer un morceau. Il me semble qu’après la rencontre avec RZA, j’ai d’abord travaillé avec Ghostface. Puis il y a eu Cappadonna, l’album Wu-Tang Forever, quelques projets annexes comme l’album de Shyheim… En gros, soit Power, soit RZA me passaient un coup de fil pour m’informer de qui se trouvait en studio. Ils s’arrangeaient pour que je vienne sur place… C’est un peu flou maintenant, mais ça se passait à peu près comme ça. Tout est allé très vite.
A : A cette époque, tu avais quitté Chicago ?
T : Oui, j’avais emménagé à New York.
A : L’adaptation à cette nouvelle ville n’était pas trop difficile ?
T : Mmmmmh, non. Il y a une part de ma personnalité qui a toujours besoin de nouveauté. Même aujourd’hui, j’ai du mal à rester en place pendant longtemps. Je dois avoir des troubles de l’attention ! J’aime quand les choses bougent, ça me donne le sentiment de m’accomplir. Il faut que je coure, mais pas pour rien. Rebondir pour rebondir, ça ne m’intéresse pas. Il me faut un objectif.
Je suis arrivé à New York à la demande de Power et Howard Edwards. Leur discours, c’était que si je voulais vraiment faire carrière, il fallait que je sois sur place avec toute l’équipe. Rien ne me retenait à prendre cette décision, c’était ma vie à l’époque. En Californie, ma famille me soutenait, ils étaient au courant de tout. Ma mère est même venue pour rencontrer tout le monde. On ne peut pas dire que j’en étais réduite à dormir par terre, j’ai toujours eu une bonne situation. Je ne me suis jamais sentie en danger à mon arrivée – le danger est arrivé plus tard [rires].
Et puis, je me fais des amis assez facilement. Je suis un aimant pour personnes biens, j’attire ceux qui devinent quelque chose en moi, alors où que j’aille, je me sens protégée. Ça doit être un don du ciel. Je sais aussi le genre de personnes dont je dois m’éloigner. Vivre à New York à cette époque-là, c’était super. J’avais les yeux grands ouverts mais pas comme une biche prise dans les feux d’une voiture ! Plutôt comme une gosse émerveillée : « Wouah, c’est trop cool, c’est le plus beau jour de ma vie ! » [rires]. Je n’avais pas peur du tout, j’ai vécu à fond cette aventure, découvrir la ville, m’y perdre, rencontrer du monde… J’ai rencontré par hasard des gens qui sont toujours mes amis à ce jour. J’ai croisé des gens au marché, à la librairie, au coffee shop, et nous sommes encore en contact. Pour moi, c’est bien la preuve que j’étais censée être à New York en ce temps-là, tout comme je suis censé me trouver où je suis maintenant. Je n’ai aucun problème avec le changement car avec la maturité, on découvre que la transition est nécessaire. Ce n’est peut-être pas le cas pour tout le monde, mais c’est le cas pour moi. Il faut comprendre et accepter le changement. Foncer et profiter. Moi j’ai profité à fond.
A : Tu as dit que le danger est arrivé « plus tard ». Qu’entends-tu par là ?
T : Et bien, j’ai vécu quelques situations vraiment terrifiantes mais ce n’était pas directement lié au Clan. C’était surtout des bagarres en club, des conneries de ce genre. Il a même fallu que je me décide à choisir un groupe de personnes pour m’entourer pendant nos concerts. Les mecs du Wu-Tang ont la réputation de ne jamais se laisser emmerder. On ne peut pas leur manquer de respect. Ils ne débarquent pas pour chercher la baston, mais si tu leur manques de respect, ils ne reculeront pas. J’ai donc affronté cette violence de très près. Une fois en particulier, l’un des producteurs exécutifs du Clan s’est pris une balle dans le bras alors que je me tenais à côté de lui, épaule contre épaule. Ça a été un tournant pour moi. Ce n’était pas la première fois que ce genre de chose arrivait, mais pour sûr, ça a été la dernière. J’ai dit « OK, vous savez quoi ? Si ces mecs veulent continuer à se taper ce genre d’histoires à chaque fois qu’on part en concert, je vais devoir envisager les concerts d’une autre manière« . Il y a eu une autre embrouille pendant un gros concert au Joe’s Pub, à New York. RZA était là, d’autres types du Clan avec lui, et ce type a dit un truc qu’il ne fallait pas dire. Le mec s’est tellement fait défoncer, il a fallu évacuer le club. Une ambulance a du venir le chercher, la totale. Je ne voulais vraiment pas que ce genre de choses se reproduise, mais ça m’a aussi amené où j’en suis aujourd’hui. Ça m’a aidé à comprendre comment je devais gérer mes affaires. Il fallait abandonner cette partie de mon affiliation au Wu-Tang. Moi, j’arrive en paix pour que les gens passent un bon moment. Personne ne veut se battre pendant le concert d’une chanteuse soul [rires].
A : A tes débuts, tu vivais à Staten Island ?
T : Lors de mon premier séjour à New York, je vivais à Staten Island, juste en face de Bay Street, dans un appartement dont Power et Cleeve étaient propriétaires. Vraiment sympa, un coin parfait. Ensuite, j’ai eu mon propre appartement à Brooklyn, devant Ocean Parkway – j’adorais cet endroit, juste à côté de Prospect Park. Ha ! Ca me ramène super loin, c’est marrant tous ces souvenirs. Ça faisait des années que je n’en avais pas parlé. Pose-moi encore des questions !
A : Un titre marquant pour toi, c’est ‘Second Coming’ dans l’album « Wu-Tang Forever ». C’est un titre étrange, on dirait un bulletin de propagande Wu-Tang… Comment est né ce morceau ?
T : Quand j’ai entendu le beat pour la première fois, j’étais à fond. « Je le veux ! Je le veux ! Je le veux ! » RZA voulait raconter une histoire autour du besoin pour les gens d’avoir notre musique dans leur vie. Il m’a dit « Il faudra que tu chantes quelque chose de ce style « . Alors moi : « Bon, d’accord… « . On a fini par écrire les paroles ensemble. Pour être honnête : c’est l’un des morceaux pour lesquels je… En fait je ne supportais pas ce morceau ! [rires] J’ai même demandé à RZA : « Tu ne vas quand même pas mettre ça sur l’album ? » Et lui m’a répondu « Si si, je vais le faire !« . Tous les chanteurs ont des titres dans ce genre : tout le monde kiffe, alors que pour toi ça ne passe pas du tout. Je n’aimais pas ma performance, elle aurait pu être bien meilleure, j’avais posé vers 4h du matin… Il a fallu que tu cites ce titre-là, c’est horrible [rires].
A : Avec le recul, tu arrives à apprécier le morceau ?
T : Mmmmmh, je ne peux pas dire que je l’aime. Ce n’est franchement l’une des mes créations les plus abouties, pour être honnête.
A : Quels sont tes titres préférés de cette période ?
T : J’aurais du mal à… Si, j’ai vraiment bien aimé ‘Manchild’ [Shyheim] et aussi ‘Black Boy’ [Cappadonna]. Voilà, ça c’est des morceaux que j’aime !
« Ma concentration, qui était celle d’une artiste, est devenue celle d’un parent. Toute l’intensité et la passion que je donnais à la musique, je les ai données à ma fille. »
A : Malgré le succès du Wu-Tang, tu as fait très peu de collaborations en dehors du collectif. C’était un refus de ta part ?
T : J’étais concentré sur le Wu-Tang car c’est là que je me sentais le plus à l’aise. Et puis, je n’avais personne pour m’accompagner dans cette démarche, pour me dire « OK, maintenant tu es chanteuse, il faut que tu ailles proposer ton talent à d’autres ». Je ne connaissais pas le business comme je le connais maintenant. J’ai fait un titre avec KRS-One mais j’aurais pu aussi travailler avec Nas ou Busta Rhymes. C’était des choses qui m’échappaient, et j’étais bien où j’étais. J’ai vu comment étaient traitées les femmes dans le hip-hop. Je n’avais pas la peau assez dure pour supporter cet aspect d’une industrie dominée par des hommes. Très clairement, je sais que j’aurais du subir des avances. C’est dommage, car avec un peu d’aide et un peu d’expérience, j’aurais pu tenter ma chance mais j’ai laissé cette anxiété liée au regard des autres prendre le dessus. Mais ça m’allait. Enfin, maintenant que c’est derrière moi, ça me va.
A : Être une femme dans le hip-hop, c’est si difficile ?
T : Oui. Même en tant que spectatrice, en enlevant l’aspect artiste de mon raisonnement. Regardons les femmes dans l’industrie du disque – ou au moins dans le hip-hop, sans parler du Rn’B ou de la soul. Je parle des femmes qui, d’une manière ou d’une autre, sont liés à un mode de vie hip-hop. Le sexe est partout, c’est à la limite de l’obsession. Même si tu te tiens à carreau, on peut te coller une mauvaise image si tu ne fais pas attention. Il y a un équilibre très fragile à maintenir. Peu importe que tu sois médiatisée ou pas, ce sentiment est omniprésent. Même en coulisses. Beaucoup de femmes ne veulent pas aborder le sujet, et ça me pose un problème. Personne ne dit rien. Il faudrait pourtant en discuter, mais d’une manière naturelle, sans haine. « Hé, vous avez vu ce qui se passe ? ».
Prend les femmes qui font du rap à l’heure actuelle. Il doit y avoir deux de leurs albums dans les bacs [rires]. Bien sûr, une poignée de chanteuses soul/Rn’B sont visibles, mais c’est la partie émergée de l’iceberg. Je te garantis : si une artiste joue la carte du sexe, elle aura bien plus d’attention autour d’elle. Mais c’est la société elle-même qui veut ça. Les choses sont ce qu’elles sont, c’est ainsi, mais je pense qu’on devrait tous avoir une petite conversation sur le sujet. Une conversation, pas une confrontation. Ça ne doit pas rester un sujet à discuter uniquement entre femmes, les hommes doivent participer aussi. Certains d’entre eux ont des filles, des sœurs, et ils ont bien sûr tous une maman. C’est un débat dont tout le monde ressortirait grandi.
A : La sortie de ton album était prévue en 2001. Huit ans plus tard, toujours rien. Que s’est-il passé ?
T : Je ne sais plus si j’étais encore sous contrat avec Razor Sharp en 2001. Nous avons connu de graves difficultés, RZA a du racheter l’intégralité des masters pour que l’on rompt le contrat. Et surtout, j’ai ma fille qui est née en 2000, donc tout ce que j’ai pu faire entre 2000 à 2006 a été très sporadique. J’ai fait quelques projets avec Armand Van Helden, un projet avec KRS-One, j’ai fait aussi un peu de tournée à l’étranger tout en élevant ma fille.
Ma concentration, qui était celle d’une artiste, est devenue celle d’un parent. Toute l’intensité et la passion que je donnais à la musique, je les ai données à ma fille. Elle a été – et elle est toujours – ma priorité immédiate et la musique suit en deuxième position. Ma fille m’a cependant montré l’important que tient la musique dans ma vie. Avoir un enfant est une chose, mais partager ma musique en est une autre. Ma fille m’a permis de mieux comprendre que j’avais besoin de cet équilibre. Il me faut une base, une clarté, une stratégie précise. Ma fille a été l’élément déclencheur de tout ça.
Pendant tout ce temps, j’ai essayé de mettre une équipe en place et trouver les bonnes personnes pour m’accompagner. L’objectif était de capitaliser sur mon affiliation avec le Clan, le respect que ça m’apporte mais aussi d’aller de l’avant pour montrer qui est vraiment Tekitha. Pas la Tekitha qui pose deux, trois refrains, mais Tekitha l’artiste. Car je suis une artiste, j’ai un talent que j’ai pris le temps de développer avec le temps. C’est comme aller au lycée, puis à la fac, puis en master, puis débuter une carrière professionnelle. Mon parcours est le même : rien n’arrive en un clin d’œil, et on n’est jamais aussi performant que son équipe.
Ce qui me manquait dans le Clan, c’était quelqu’un pour me canaliser et m’indiquer la marche à suivre. RZA est quelqu’un qui croule sous le travail. Franchement, il a des tonnes de projets à gérer. Ça et sa famille, ses enfants… Moi, je n’allais pas mendier pour avoir son attention, c’est pas mon genre. Si je dois tout faire toute seule, alors je le ferai, c’est pour ça que j’en suis là aujourd’hui avec mon équipe. Tout le monde partage un même objectif. Nos intérêts personnels sont nos intérêts communs. Nous sommes capables de travailler tous ensemble, sans aller à rebours.
A : Qui compose cette nouvelle équipe ?
T : Il y a Jeff Jones, qui porte plusieurs casquettes. Son titre officiel serait, je pense, manager général. Ensemble, nous avons relancé Wisdom Body Entertainment et j’ai désormais un contrat de distribution. Jeff arrange tous les détails : tout passe par lui, rien n’arrive jusqu’à moi tant que les choses ne sont pas en place. Si besoin, il est également ingénieur du son sur mes sessions. Et c’est un excellent producteur, il a signé les deux premiers extraits de l’album.
A : Qui sont les autres producteurs de l’album ?
T : On a quelques morceaux de RZA, bien sûr. Il y a aussi des productions d’Armand Van Helden que je pense à utiliser. Ainsi que deux titres de Stevie J. J’aimerais vraiment les voir sur le disque, il faut juste qu’on s’assure que tout est OK sur le plan contractuel. Je travaille également avec Dub the Director, un producteur californien qui a réalisé deux titres. C’est une bonne petite équipe.
A : Comment as-tu connu Stevie J ?
T : Oh, je le connais depuis l’époque Wu-Tang. On a du se rencontrer en 1996 et on est resté en contact depuis.
A : Quelle serait la différence entre ton album actuel et celui de 2001, si tu avais pu le sortir ?
T : Et bien déjà, l’album de 2001 n’a jamais été terminé. Voilà une première différence. Le nouveau est une photographie limpide de ma personnalité. J’ai un côté très rue, j’aime les beats crades et sombres. Mais je suis aussi une fille qui aime les petites salades marinées ! Tu trouveras donc des titres très organiques, ouverts sur le monde. J’aime aussi qui les beats solides, bourrés d’effets sabres lasers futuristes de l’espace ! Il y en aura aussi. En 2001, je n’aurais pas pu faire tout ça, je n’en avais pas l’opportunité. Aujourd’hui, il n’y a plus personne pour me dire « Quoi ? Tu veux poser sur un beat comme ça, Tek’ ? ». Je ne dois plus justifier mes choix. Je les fais, c’est tout.
L’autre point, c’est que le studio se trouve à la maison, alors plus besoin de déplacements : chacun vient au studio et c’est parti, on va se marrer. Je vais te dire un truc : en 2001, quand j’enregistrais, je ne rigolais pas beaucoup en studio. J’étais sérieuse. C’est pas un jeu, c’est les affaires et c’est sérieux ! Je portais toujours le masque, impossible pour moi de me détendre te profiter du moment. Alors que maintenant, mon Dieu ! Viens en studio avec moi, tu vas kiffer. J’ai des fous rires, l’environnement de travail est nettement plus convivial. Avec le Clan, il y avait tous ces types autour avec toutes ces meufs. Ça ne collait pas avec ma personnalité : c’était leur fête à eux, mais moi je ne m’éclatais pas vraiment. J’ai donc crée un environnement pour moi-même. Maintenant, c’est ma fête qui commence. Pas de spectateurs autorisés : soit tu es là pour bosser, soit tu n’es pas là. Le public, il n’est que là que pendant les concerts. Moi, je ne peux pas travailler si je me sens observée, c’est très stressant.
Aujourd’hui, je présente un répertoire, une collection. J’expliquais récemment à Jeff que nous ne devons plus considérer ces projets comme de simples sorties, mais comme une collection d’œuvres d’art à partager. De la même façon que les œuvres d’art restent pendant un mois dans une galerie avant d’être emmenées partout dans le monde. A la fin, quand toutes les pièces ont été vendues, on se remet au travail pour créer une nouvelle collection et plus personne ne nous voit pendant trois ans. Maintenant, c’est l’ère de la musique micro-onde. Le but, c’est d’aller vite pour faire rentrer l’argent. C’est quelque chose que je conçois complètement, mais moi, vu la musique que je fais maintenant, je demande juste aux gens de me faire confiance. Si c’est ce que vous voulez entendre, suivez-moi. N’imaginez pas que vous allez entendre quelque chose qui a eu lieu huit ans plus tôt. J’ai eu un enfant, une vie amoureuse, un toit, une famille. Je ne suis plus du tout dans la position que j’occupais par le passé. J’ai évolué, et il le fallait.
Mes fans et les gens qui m’ont avec cette loyauté dont je suis éternellement reconnaissante, j’espère qu’ils n’essaieront pas de retenir dans un seul style. Je leur prépare une vraie histoire. Quand ils écouteront l’ensemble, de la première sortie à la dernière, ils comprendront. Ce sera comme un film pour eux. Une vraie catharsis. Je ne vais pas faire un titre pop par ci, un titre soul par là. Je vais faire moi . C’est un immense plaisir, et j’espère que le public ressentira aussi le plaisir que je prends.
A : Une date de sortie est prévue ?
T : Le contrat est signé. Il nous reste à définir une date et nous organiser en fonction de cette date.
A : J’ai lu un commentaire sympa à ton sujet sur YouTube. Une internaute a écrit : « Quand on écoute Tekitha, on dirait qu’elle use de son âme pour déconstruire l’enfer depuis l’intérieur du royaume du mal pour y rapporter vie en plantant des graines de paix et de beauté « …
T : Mon Dieu, tu peux me redire ça ? C’est à tomber par terre, on a vraiment dit ça à mon sujet ?!
A : Oui, et d’ailleurs c’est assez rare de lire ce genre de choses sur YouTube…
T : Je sais bien, les gens sont tellement cruels ! Wouah… Tu vois, j’essaie de ne pas trop cogiter sur ce que je fais en musique, mais si je fais vraiment ce que dit cette personne, ou si elle a ressenti ça en m’écoutant, alors que Dieu la bénisse et faites que je puisse continuer. C’est tout ce que je demande.
A : En 2006, tu as dit lors d’une interview que pendant un temps, la tristesse et le désespoir étaient tes seules sources d’inspiration. C’était ton état d’esprit de l’époque, ou simplement le sentiment le plus immédiat pour trouver l’inspiration ?
T : Ça n’a pas beaucoup changé. Comme je te disais tout à l’heure, j’ai une compassion profonde pour la vie humaine. Je me retrouve dans la tristesse et le désespoir, mais je me retrouve aussi dans l’espoir que peuvent me donner les autres. Je ne chante pas la tristesse, j’utilise ma voix et mes paroles pour en faire un sentiment d’espoir. C’est peut-être Dieu lui-même qui a choisi de délivrer un peu d’espoir à travers ma voix. Je n’ai pas vraiment une voix pop, genre « Woo-oooh, c’est la fête, ouais ouais ouais ! » comme si tout allait bien dans le meilleur des mondes. Mais pourtant, à l’écoute de mes chansons, tu ne te sens pas abattu. Je puise un peu de tristesse dans le cœur des gens pour pouvoir y apporter la lumière. Je ne veux pas qu’ils soient tristes car je sais ce que ça fait d’être dans cet état, et je sais aussi ce qu’il y a de l’autre côté. Mon but, c’est de les assister pour qu’ils puissent atteindre la joie.
A : Tu es croyante ?
T : Je ne dirais pas que je suis croyante, mais je crois en l’esprit. Je crois qu’il existe un seul Dieu, un créateur qui a bâti un paradis sur Terre et un univers avec une fin. Je m’intéresse beaucoup à l’origine des religions. J’ai étudié l’Islam, le Christianisme, le Bouddhisme et le Taôisme. J’essaie de retirer des choses de chacune de ses religions pour essayer de m’améliorer au fil du temps.
A : J’ai lu également que tu était une grande fan de films des années 40/50. C’est vrai ?
T : [enthousiaste] Oh mon Dieu oui, j’adooooore les vieux films ! Quand j’étais petite, ma mère et ma grand-mère adoraient les films des années 40 et 50, c’est là que je les ai découvert. Un film comme « Sunset Boulevard », par exemple, c’est vraiment une expérience visuelle éblouissante, du scénario au jeu d’acteurs en passant la mise en scène et les costumes. Ça éveille tous mes sens. Pour moi, c’est bien mieux que les gros films d’actions où ça flingue à tout va. J’aime quand un film me fait réfléchir, quand je cherche à deviner comment il va finir. C’est de la nourriture pour l’esprit. Et c’est toujours un plaisir, car tout est inattendu. Dans beaucoup de films d’aujourd’hui, tout est prévisible, tu peux anticiper le moindre événement.
A : Tu as dit que l’une de tes collaborations rêvées serait Andre 3000. C ‘est vrai que vous avez l’air faits l’un pour l’autre. Tu as déjà essayé de prendre contact ?
T : Non mais j’ai pris contact avec Cee-Lo l’année dernière. Maintenant que Jeff et moi avons le disque entre les mains, nous sommes prêts à faire des démarches et établir des connexions. J’ai une liste de personnes avec qui j’aimerais travailler, si ça ne se fait pas pour l’album, ça peut se faire pour des remixes. Je pense vraiment qu’il faut avoir un produit pour attirer l’attention, et par le passé je n’avais pas un produit dont j’avais suffisamment confiance. Alors à l’avenir, je vais tenter d’approcher Dre, Rick Rubin et Pink. J’aimerais vraiment travailler avec elle. Il y a d’autres noms sur ma liste, et maintenant ça fait sens pour moi de les démarcher. Et ce sera fait.
A : On sent que la maternité a été un élément crucial de ta carrière. Tes derniers mots dans cette interview pourraient être pour ta fille. On a l’impression que le producteur exécutif de ton album, c’est elle…
T : Ha, c’est exactement ça ! Cette fille, c’est un sacré talent. Elle a eu 9 ans le 1 e août dernier. Elle aussi écrit des chansons, et c’est une petite scientifique. Elle est en CM1, c’est un petit bout de femme très maligne. Elle ne ressemble pas aux autres enfants de son âge. Elle adore tout ce qui touche à l’art, elle aime créer des choses d’elle-même, on forme une équipe parfaite. Et oui, elle est sans aucune doute mon producteur exécutif : elle est capable de me prendre entre quatre yeux pour me dire « Maman, pendant ton concert, il faut que tu arrives comme ça, et que tu fasses ça, ça et ça ! ». A chaque fois, c’est une idée fabuleuse qui sort de nulle part. Tu peux être sûr qu’elle n’a pas vu ça à la télé, c’est juste le fruit de son imagination. Une petite gamine sacrément douée du haut de ses 9 ans. Elle est tout pour moi.
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