Luxe Timeless, l’art d’être intemporel
Interview

Luxe Timeless, l’art d’être intemporel

Luxe Timeless fait partie des forces singulières du rap français de par son parcours international entre les États-Unis et la France, et multidisciplinaire entre le break, le graff et le rap. Retour avec lui sur ses derniers projets, ses réflexions profondes sur la société et ses ambitions.

Photographies : Juzenshi.

La définition littérale d’intemporel est : qui est indépendant du temps. En plus de cela, LuXe Timeless s’affranchit aussi de la majorité des règles conventionnelles de l’industrie. Celle qui a souvent mis de côté les OG’s de la première génération, corps de garde du bastion du hip-hop, ceux avec qui LuXe a pu battre le pavé new-yorkais. Tout arracher et apprendre à la dure, c’est ce que les loups autodidactes font. Afin de maîtriser sa carrière de A à Z et de calibrer précisément un flingue surchargé d’expériences, le rappeur réalise tout : de l’enregistrement au mixage, de la cover au clip, du financement à la promotion entre struggle et hustle.

Seul, la réussite paraît lointaine dans une ère où bien rapper ne suffit plus pour briller tant les artifices annexes à la musique ont pris une place prépondérante dans le jeu. Alors LuXe s’entoure de ce qu’il a de plus cher pour gérer son business avec lui. La famille qu’il s’est construite dans la rue et dans des battles de breaks fougueux dans les années 2000 : le 95Zoo. Une époque révolue dont l’énergie se ressent à travers la photo qui fait office de cover du projet Business Moves avec Bessy Bess, son acolyte de toujours. « Une pièce d’histoire infalsifiable ».

Une histoire qui rassemble d’autres histoires qui ont forgé le street knowledge de LuXe Timeless.


Abcdr du Son : Depuis ta dernière interview avec B2, en 2019, tu as rajouté Timeless derrière LuXe. Tu perdures depuis des années dans la culture hip-hop. Quelle est ta vision et ton rapport avec le temps ?

LuXe Timeless : Le temps est une illusion. Je suis un fervent croyant, je suis musulman. Dans le Coran, il est dit que quand tout sera fini, tout ça n’aura été l’équivalent que de quelques heures. À nous d’interpréter « ça », tu peux le voir comme toute ta vie ou l’histoire de l’humanité toute entière. Ensuite, quand tu observes avec l’expérience, la sagesse ou juste avec la connaissance, il y a des choses qui se répètent, il y a des cycles qui reviennent à l’infini. Le fait de dire que les jeunes ne veulent plus travailler, ça existe depuis l’Antiquité par exemple. Je ne suis vraiment pas fan des analogies récurrentes avec le film Matrix mais finalement c’est un très bon outil social pour comprendre plein de trucs du monde d’aujourd’hui, malheureusement. Il y a plein de glitchs, des trous dans le code où si t’arrives à mettre ton œil dans le truc précis, tu vois qu’il y a une couille. Quand tu vois justement toutes les théories qui sont basées sur une pratique, qui ont essayé de prouver une certaine continuité linéaire de la chose, les théories et les recherches qu’on essaye de faire sur l’origine de l’univers, tu as toujours des nouveaux éléments qui entrent en compte. On se rend alors compte qu’on ne sait rien ou on ne sait pas à quel point on avait d’informations disponibles. D’un côté, il y a un manque de connaissances abyssal et de l’autre une surabondance de choses qui sont disponibles et on a pas encore, collectivement, les capacités pour organiser tout ça. Après, il y a aussi les expériences personnelles qui me font comprendre que le temps est une illusion.

A : Est-ce que tu te considères comme anticonformiste ?

L.T : Oui peut-être parfois par réflexe, par survie, par instinct, des fois c’est peut-être ma manière de me socialiser. Comme il y a des gens qui se socialisent en étant comme tout le monde. J’ai eu une immense partie de mon éducation grâce et uniquement au hip-hop, très proche de sa forme originale qui est très anticonformiste. Tu rends cool ce qui n’est pas censé être cool, tu rends frais ce qui n’est pas censé être frais. À la base, on n’a pas d’argent, on ne veut pas de nous, on ne rentre nulle part. On a réussi à faire quelque chose de gigantesque collectivement.

A : Quand on parle des Zulu Kings et des Black Spades à qui tu es affilié, on pense souvent aux années 1970 – 1980. Tu as déjà raconté ton rite d’initiation. Est-ce que ces deux entités sont encore actives aujourd’hui ?

L.T : Il y a eu des transitions on va dire. Pour t’expliquer, la vie de rue à New-York est beaucoup plus codifiée que dans pas mal d’autres endroits. C’est le centre business du monde mais il y a un côté très tribal en même temps. Mais tout va super vite, la rue change. Le gros changement a été de voir des Bloods et des Crips à New-York. Ce qui est marrant, c’est qu’une grande majorité de Bloods importants de New-York sont des petits cousins, petits neveux de Black Spades. Le sang, sans mauvais jeux de mots, crée un lignage, une hiérarchie, une continuité de facto. Mais au-delà de ça, oui ces deux entités sont encore actives. Et d’autres encore comme les Savage Nomads, La Westside Familia à Harlem etc.

A : Tu es aussi issu du break. Comment tu expliques que le rap a été l’enfant gâté du hip-hop au détriment des autres disciplines ?

L.T : La distinction s’est faite assez tôt. J’ai eu la chance de pouvoir être formé entre autres par Grandmaster Caz, le roi du Bronx pendant la période créatrice du rap tel qu’on le connaît aujourd’hui. Ce mec là, qui m’a beaucoup appris et que j’ai eu la chance de côtoyer… Son parcours te montre que très tôt, à la fin des années 1970, début des années 1980, le rappeur avait un produit à vendre, le disque. Le break, il n’y avait pas encore ce truc-là. Il y a eu des essais, mais ça n’a pas été fructueux. Le graff, c’était encore trop sauvage. Il n’y avait pas encore le truc de juste vendre des tableaux. Il y avait certains mecs qui le faisaient. Par exemple, Basquiat avait peut-être plus accès au New-York gay. Le Downtown New-York, c’est ces mecs-là. Ce sont des débats compliqués. Le gros truc, c’est qu’il y avait un produit. Le consensus de tous ceux qui s’y connaissaient avant moi et qui étaient là à cette époque, ils te diront que c’est ça la différence. Il y avait un produit. Comme il y avait un produit, il y a eu des investissements qui ont été débloqués. Il y avait une industrie qui était déjà plus en place et plus malléable. Elle pouvait donner une place à un nouveau genre. L’industrie de la danse ou de l’art, c’était des trucs très classiques, des bobos de base. Maintenant, tu les vois. Tu regardes à Paname les galeries d’art ou les organismes de danse. Ce sont des gens avec qui tu ne peux pas discuter plus de cinq minutes. Tu leur parles de business, ils ne pensent pas à ça. Il y avait ce côté business dur qui était installé dans l’industrie du disque. Il y avait le disco, le funk et la soul. Tous ces territoires de la black music au sens large (même latino) étaient installés commercialement. Le rap est arrivé en dernier. C’est pour ça que James Brown dit qu’il est le daron à tous les rappeurs. C’est un peu ça le truc. « J’ai fait le travail pour que vous veniez et que vous puissiez prospérer. » Ce qui est vrai. « Vous m’avez pris le groove, le rythme, le funk, les samples. Vous m’avez pris le côté black excellence, le côté fierté, le côté business, le hustle, etc. » Que Dieu le bénisse. Il a fait un travail gigantesque. Si on me demande le plus grand artiste musical de tous les temps. Il n’y en a qu’un seul. Il n’y a personne qui puisse rivaliser. Michael Jackson lui-même l’a dit. Je ne me prononce même pas à sa place. Je ne peux pas me prononcer à sa place. Il a parlé.

A : Tu es né dans le 93 de parents iraniens, tu as vécu aux États-Unis et dans le 95. Quelles sont les différences entre être un rappeur en Iran, aux États-Unis et en France ? On pense à Toomaj Salehi qui a été condamné à mort pour avoir critiqué le régime iranien, notamment.

L.T : Je vais être un peu bourrin dans ma réponse. La France, de tout temps, a eu une excellence française. Elle a existé. J’ose espérer qu’elle existera. Mais il y a toujours eu une majorité médiocre. Une majorité qui n’est pas encline à l’optimisme. Pas ouverte. Qui n’est pas dans le truc de pouvoir s’amuser mais bien. Si tu t’amuses, c’est que tu fais des trucs pour la chicha qui sont dégueulasses. Mais tu n’arrives pas à faire un son fun. Ce qui est important, c’est de faire du bon son. Je ne demande pas à tout le monde de faire du Mobb Deep. Ce qui est important, c’est de faire du bon son. La France, je vais mettre les pieds dans le plat, nique ce qui est beau. C’est la majorité médiocre qui fait ça. Je déteste la politique et tout ça, je préfère m’axer sur les faits, mais si tu t’axes sur les faits, la France c’est un putain de pays de délateurs. Mais pour autant, il y a toujours, on dirait de tout temps, en tout cas de ce que j’en sais, une minorité de gens extrêmement courageux, extrêmement intelligents et des gens incroyables, brillants. Moi-même, dans mes expériences personnelles, j’en ai connus et j’en connais. J’espère en connaître même plus et j’espère de tout cœur que cette minorité-là aura un impact démesuré sur la suite de ce pays. Les élites mauvaises ont fait un boulot sur la majorité tellement dur, que c’est elle même qui fait le boulot maintenant sur son environnement social, au lieu des élites. Là j’ai un peu posé le côté français. Les cainris, c’est des gens qui aiment l’ardeur. L’ardeur au travail. « Push it to the limit. » Ils aiment ce qui est grand, ce qui est beau. Ils aiment prendre tout ce qu’il y a de beau partout et en faire un gigantesque mix et le faire mieux que tout le monde. Ils aiment créer et exécuter. Ils ont ça dans le cœur. Et le fait que ça vienne de là-bas, que c’est culturellement installé, il n’y a pas autant de stigma que ça. En France, ce n’est plus stigmatisé maintenant. Absolument, tout le monde rappe. Ça rappe même plus qu’aux States là maintenant. Genre là, ça y est, il y a eu la pandémie, frère, le coronavirus, « j’ai plus de temps, je vais devenir rappeur. » Ceux qui n’y arrivaient pas, c’était : « je vais devenir un créateur de contenu, je vais dire aux gens comment devenir riche sur Instagram etc. » Moi, par exemple, j’ai toujours été fan des interviews parce que ça a été un moyen important d’avoir des connaissances pour ceux qui n’avaient pas accès à certaines personnes, qui n’avaient pas forcément la capacité ou la chance d’avoir pu voyager comme je l’ai fait, même si c’est un truc que j’ai arraché à la dure. Mais j’éprouve une certaine haine envers les anciens qui vont trop perdre leur temps comme ça en podcast. Je trouve ça super triste. Je trouve ça cheum, je trouve que c’est du gossip la plupart du temps. Ça dégomme le legacy qu’ils veulent laisser. Le pire, c’est qu’on leur fait croire que c’est comme ça qu’ils vont laisser un legacy parce que maintenant, « c’est comme ça que les choses se font. Si tu ne fais pas ça, les gens vont t’oublier. » Et c’est peut-être vrai d’un côté, mais moi, je préfère me battre. Je préfère me battre sur le terrain compétitif pour le faire de la bonne manière parce que sinon, frère, moi aussi, je peux aller dans tous les podcasts de France et de Navarre et prononcer les blases de tout le monde. Mais chez nous, on ne fait pas ça. Il y a un standing qui vient avec le fait d’être un rappeur, t’es censé être un super-héros un peu. T’es censé être un « G ». Un homme d’honneur. Un homme d’honneur ne passe pas son temps avec le blase des autres hommes dans la bouche. Sauf ses ennemis. Et ses ennemis, même moi, je ne préfère pas en parler. Je ne préfère pas leur parler, je préfère faire ce que j’ai à faire. Ou ne pas faire ce que j’ai à faire et laisser entre les mains de Dieu. Il y a différentes manières de gérer ça. Mais je pense que la manière de gérer ça, ce n’est pas d’arriver dans les podcasts et dire « ouais, il y a eu ça, il y a eu ça ». Tu vois ce que je veux dire, ce n’est pas comme ça. Pour moi, en tout cas. Mais je sais que je suis une minorité. Les gens aiment bien ça, parce que c’est des voyeurs, ils veulent tout savoir. Ils veulent savoir exactement quelle était la relation de X avec Y à tel moment. Pourquoi est-ce qu’un mec, il a fait ça ? Parce que c’est des voyeurs, ils ont besoin de ça. Et maintenant, l’Iran. Bah l’Iran, c’est à la lumière de ce qui se passe actuellement. J’ai un avis qui n’est pas très orthodoxe. J’ai le sentiment qu’une grande partie de la jeunesse iranienne est victime d’une propagande occidentale. Ça veut dire qu’ils ont acquis une forme de haine de soi. Moi, par exemple, qui ai été déraciné toute ma vie, je n’ai jamais pu y aller. J’ai envie de leur dire, vous ne vous rendez pas compte de la chance que vous avez de pouvoir vous lever dans un pays ravagé de sanctions, soit, mais ravagé de sanctions parce que, quoi ? Parce qu’il s’est levé contre l’impérialisme américain ? Parce qu’il s’est levé contre l’impérialisme israélien ? Vous ne vous rendez pas compte de ça ? Il n’y a pas de bon dans ça ? Vous ne voyez pas que dans le reste du monde, les gens sont misérables malgré leur richesse relative et qu’ils se battent contre ça avec le peu de moyens qu’ils ont ? Pour en venir au rôle du rappeur. Le rap, socio-psychologiquement, vient en partie de la souffrance qui a été imposée par l’impérialisme occidental. Du coup, ça devient un exercice très compliqué quand t’es un rappeur et que par automatisme, peut-être, tu te dresses contre le gouvernement alors qu’il est la cible numéro un, j’oserais dire, de l’impérialisme occidental. C’est problématique. Je ne peux pas dire que ce n’est pas problématique, mais quand tu creuses le sujet, c’est plus compliqué que de dire « regardez les fils de pute en haut de l’État ». Moi, je déteste tout ça. Parce que comme j’en sais trop sur ce sujet, je n’aime pas. Du coup, ça me fait chier de passer du temps dans une interview à parler de ça. Mais au final, en le faisant, je comprends pourquoi ça peut peut-être être pertinent. Parce que j’ai un point de vue que les gens n’auront pas. Mais en même temps, je ne vois pas l’utilité du débat ou de creuser trop sur ce sujet. Les gens ne veulent pas de débat. Les gens pensent ce qu’ils veulent penser. Tu peux leur mettre tous les arguments factuels derrière, ils s’en battent les couilles. Moi, je n’ai pas d’âme à gagner. Je ne suis pas en campagne. Je fais du gros son.

« Le rap, socio-psychologiquement, vient en partie de la souffrance qui a été imposée par l’impérialisme occidental. »

A : D’ailleurs, pour parler de gros son, de 2020 à 2022, tu sors beaucoup de morceaux. Tu affines ton univers et ta musicalité. Avais-tu des objectifs précis ?

L.T : Oui et non. C’est-à-dire que les objectifs précis que j’avais, c’était au-delà de l’expression de mon art et du fait de ne pas perdre de temps. Je n’aime pas perdre de temps. Timeless. Je n’aime pas être limité par ça. Je sors parce que je suis surchargé, je déborde d’expérience. Ce que je dis, c’est vrai, c’est réel. Je pourrais m’enfermer dans une chambre pendant les vingt-cinq prochaines années et j’aurais encore de quoi dire plus que l’immense majorité dans le game. C’est sûrement ma plus grande force. C’est ça qui me rend infatigable. Comme j’ai beaucoup dans le chargeur, j’ai besoin de le vider pour pas que le flingue se rouille. Je ne veux pas attendre d’avoir des centaines de millions à mon actif pour mettre mon truc en avant. Je n’ai pas envie d’attendre que X ou Y se disent, « ouais, je vais le pousser. Ce mec-là mérite le succès. » Chez moi, ça ne fonctionne pas comme ça. Chez moi, c’est tu vas, tu montres et tu gagnes le soutien à force de travail. À force d’obligation et à force de prouver, etc.

A : Tes productions sont souvent créditées « Studio LuXe », est-ce que vous êtes plusieurs à produire les sons ou tu es seul ?

L.T : C’est ma femme et moi. Ma femme que je garde dans le domaine privé, produit une grosse partie de mes sons et une grosse partie de ma future carrière. Je fais ce que j’ai envie d’entendre et elle fait ce que je ne savais pas que j’avais envie d’entendre.

A : Tu as des visuels très singuliers, comment en as-tu eu l’inspiration ?

L.T : Je suis rentré dans cette culture via le graff. J’ai commencé le graff vers mes 8 ans, dans le 93. Très, très, très, très, très tôt, tu vois ce que je veux dire. J’ai commencé le graff tellement tôt que ça a affecté à vie ma manière même d’écrire manuellement. C’était pas juste un effet de style, c’est juste que j’ai commencé tellement tôt que c’était comme ça que je m’exprimais. On va dire que je suis un mix d’influence de certains grands graffeurs et certains grands mangakas.

A : Qui serait ta légende du graff ?

L.T : C’est très dur d’en choisir une. En fait, à chaque fois que je veux dire un blase, je me dis, tu ne peux pas dire ce blase-là, il n’y a pas que lui. Je vais te citer un allemand : CAN2. Il est flippant. Il est trop fort. Genre ça te prend ton troisième œil, ça l’ouvre en six, ça l’engorge de lumière, après t’explose, tu meurs et tu reviens.

A : « T’es mon négro si t’as plus d’une corde à ton arc », c’est important pour toi d’être polyvalent dans plusieurs domaines et disciplines ?

L.T : Un gros thème de ma vie, c’est que j’en avais marre de devoir compter sur quelqu’un pour un truc. Je finis par le faire. Et ça, ça a été le cas pour plein de trucs. Ça a été le cas pour le graff, moins que pour les autres parce que j’étais petit, c’était plus organique. Mais le break, c’était ça. J’ai kiffé le break. Et tous ceux que je connaissais qui savaient un peu breaker, je leur demandais « Vas-y, break, break, break, s’il te plaît ». Je kiffais ma race. Mais très vite, je me suis dit « Mais attends, t’es une galère de les fatiguer pour qu’ils break. Toi, break ! » Pour le rap, c’est pareil. Au bout d’un moment, j’étais là « Mais pourquoi est-ce que j’attends ça de tous mes rappeurs préférés ? » Après, je suis frustré quand ils ne le font pas. Pour les covers, je me suis dit « Attends, t’as toute cette expérience, tout ce savoir-faire, toutes ces influences à livrer, toutes ces transmissions à faire, et tu le fais pas, t’es encore en train de gratter des potos ou des trucs pour des covers ? » C’est pas comme ça. « Lève-toi et marche. » Et c’est marrant parce que j’en suis encore au stade où il y a peut-être plus de critiques que de compréhensions. Alors que les covers du rap français, elles sont giga éclatées 98 % du temps. Et là, encore une fois, t’as un mec qui, factuellement, a vraiment fait ses armes dans le truc. Les graffeurs dont je te parle, l’immense majorité, je les ai rencontrés, ils ont signé mon putain de blackbook quand j’en avais un. Ils m’ont mis à l’épreuve. Il y a des rites de passage, je ne me suis pas improvisé le truc. J’ai aussi vendu des tableaux pour des collections privées. Mais ça, en fait, les gens ne le savent pas. C’est là où le storytelling est important. Mais le problème du storytelling, c’est que ce n’est pas toi qui dois le faire. Alors là, maintenant, tu vois, il y a un jeune qui est maintenant très proche de moi, qui gère ma page actu et tout. Il commence un peu à prendre ce rôle. On se heurte au fait que c’est tellement large, que j’ai tellement taffé sur tellement de sujets. Il y a tellement d’interviews à faire, de gens à voir, de connaissances à prendre, à écrire, à mettre en forme et tout. On se heurte au fait que, comme il n’y a pas encore le giga intérêt pour la musique qu’il est censé y avoir, on est un peu au ralenti pour l’instant. Mais j’estime qu’une fois qu’un éventuel public peut avoir accès à ces éléments, il est plus à même de comprendre le travail d’un artiste. Pour autant, je suis quelqu’un qui est persuadé que tu n’es pas censé avoir besoin de contexte pour comprendre ce qui est bien et ce qui est beau.

A : Est-ce qu’il y a des médias sur lesquels tu as appris des choses ?

L.T : Je parlais de ça avec mon gars Rolecks. Je lui ai dit, pas forcément. Par contre, là où j’ai appris des trucs, c’était sur les forums. Je dis ça parce que j’étais dans les forums de break. J’espère que parmi les rappeurs, il y en a qui vont peut-être lire cette partie-là et qui vont peut-être être inspirés ou en tout cas, qui gèrent des médias, etc. Dans les forums de break, il y avait à peu près tous les OG’s qui étaient importants, et quand je te dis importants, je te parle depuis les années 1970. Ils se sont tous exprimés à un moment sur les forums de break. Ça a assuré un passage de flambeau qui ne s’est pas fait dans le rap. Aux États-Unis, il y a peut-être Jay Electronica qui a interagi dans les forums avec les gens. En fait, c’est peut-être là le truc. ll y a tout le monde qui parle de rap, mais on ne donne pas la parole aux rappeurs , et à quels rappeurs ? En plus, on ouvre l’espace médiatique à tous ceux qui font quelque chose qui est du rap affilié, qui veulent gratter un peu le clout de notre « culture ». Je vomis ce mot tellement les gens l’utilisent à tort et à travers. Je préfère la nature que la culture. Je trouve que le break, le rap, le graff, etc, c’est des choses plus naturelles que culturelles. Ça vient de bien plus loin que les années 1970 même.

« Je préfère la nature que la culture. Je trouve que le break, le rap, le graff, etc, c’est des choses plus naturelles que culturelles. »

A : T’intéressant aussi à la technologie, que penses-tu de l’impact de l’intelligence artificielle ?

L.T : En gros, le problème, c’est que quand tu vas dans un truc où tu te dis « on va faire une intelligence artificielle », tu es obligé d’arriver à un stade où tu dois déchiffrer le vrai du faux. Et pour ça, tu as des outils. Mais le problème, c’est que l’humanité telle qu’on la connaît aujourd’hui ne survivrait pas à une décharge de réalité aussi démesurée et aussi violente. Les gens sont trop dans l’hypocrisie et trop dans le politiquement correct. Si là, 97% se rendent compte qu’ils étaient totalement dans le faux, il n’y aurait plus aucun espoir politiquement pour aucune égide. Le système hiérarchique même de l’humanité serait chamboulé. Ce serait peut-être le début d’un nouvel âge d’or, mais le séisme avant serait tellement gigantesque. Le vrai problème de ces choses-là, c’est la causalité. La raison pour laquelle ils font ce truc-là, l’état actuel des trucs AI, c’est parce qu’ils ne savent pas installer une causalité qui serait factuelle. Si tu es croyant, il y a un truc qui s’appelle la Cause Première, d’Aristote, un philosophe qui a prouvé l’existence de Dieu avec une proposition logique. Tout est cause et effet. Dieu étant la cause première et ensuite tout le reste n’est que des causalités. Si tu sais coder un peu, c’est « if / then ». « If » il y a ça, il se passe ça. C’est une base.

A :  Dans « CHANGER », tu parles d’évolution structurelle et de révolution culturelle. Selon toi, l’une n’est pas possible sans l’autre ?

L.T : Comme je disais, la culture ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est la nature. Une révolution, c’est un retour à la nature. Et donc, l’évolution structurelle revient à quelque chose de plus organique. Si tu veux utiliser un exemple, t’as vu, j’ai quelques gars dans la nouvelle génération, leur grande qualité, c’est qu’ils ont une spontanéité. Que les autres générations n’ont pas, ou qu’ils ont perdu, et quand tu les écoutes, il n’y a pas ce truc-là. Et la nouvelle génération a ce côté où certains sont à la recherche de l’excellence, mais en même temps, arrivent à te montrer qu’ils ne se prennent pas la tête.

A : Dans « L’énorme Succès », produit par Madizm, tu dis : « J’suis un hustler, j’pourrais bicrave du vent ». Quelle est ta définition d’un hustler (terme qui revient énormément dans ta musique) ?

L.T : C’est comme un cri qui vient de l’intérieur. C’est lié à la nécessité masculine. C’est-à-dire qu’un homme doit s’occuper des siens et de sa famille. De ceux envers qui il est redevable. Des fois, c’est à Dieu que tu es redevable. Pour la vie qu’il t’a donnée, les opportunités qu’il t’a données, des fois, c’est aussi simple que ça. Il y a aussi les êtres humains à qui tu es redevable. Mais la relation finale et initiale, c’est toujours avec Dieu. Il y a une énergie, il y a des acquis, il y a des manières de se comporter, il y a un sens de l’honneur et du respect. C’est un combat contre soi-même. Dans ce combat contre toi-même, tu fais parfois des dommages collatéraux. C’est comme sur les marchés financiers. Si un mec gagne, ça veut dire qu’un mec perd. Ça, je peux te garantir qu’aucun être humain sur terre n’a trouvé la solution à ce dilemme. Ni aucun animal. Pour qu’un animal mange de la viande, il faut qu’un autre meure. Donc il y a ce combat, le fait d’arriver à terme avec les complexités de ce combat et puis, le fait que, par définition, tu veux t’élever. C’est la fierté du survivant. J’ai traversé plus que l’immense majorité des gens et j’ai survécu là où beaucoup seraient morts et enterrés dix-sept fois. Par la grâce de Dieu, je suis encore là, plus fort que jamais et j’en suis fier. C’est juste un message pour les jeunes charbonneurs parce que le monde ne va pas devenir plus facile et vos darons, vos potes ont besoin de vous. Nos ennemis se lèvent et s’occupent de toute leur communauté avant même que toi tu n’aies eu le temps de prendre ton café le matin. Le Coran explique que tant que les croyants n’agiront pas de la même manière la corruption se répandra. Regarde l’état du monde actuel à la lumière de ça, une des solutions c’est la solidarité intracommunautaire et intercommunautaire. T’es un renoi faut que tu boostes les renois. Il faut aussi que tu boostes les autres parce que ça se trouve ta cousine elle est mariée avec un Algérien ou un Français. Par exemple. C’est des choses naturelles. On est fait pour apprendre les uns des autres et être solidaires avec les nôtres, c’est ça se booster. En étant unis, on est plus puissants, on est mieux, on crée des systèmes économiques, on crée des sociétés qui fonctionnent mieux. Maintenant les gens vont faire croire que les sociétés fonctionnent mal parce que les gens se mélangent. Non c’est pas vrai frère, les sociétés fonctionnent mal parce qu’il y a une minorité microscopique qui vole la valeur de quasi l’humanité entière. C’est un des thèmes que j’essaie de développer dans ma musique.  

A : En juin 2023, tu sors l’album Business Moves, avec Bessy Bess, sous l’étiquette 95Zoo. Tu as cofondé ce crew. Qu’est-ce qu’il représente pour toi ?

L.T : 95Zoo, c’est un groupe de frères, c’est un groupe de breakeurs, un groupe de cailleras. Il y a de tout dedans, des entrepreneurs, des scammers, des mecs qui n’ont peut-être pas tous suivi leur fibre artistique jusqu’au bout mais qui ont permis que des gens comme moi et Bessy Bess puissent la suivre. Ça veut dire que nous on porte leur style à travers ce qu’on fait. L’endroit où on est tous sur la cover du disque, c’était La Défense au milieu des années 2000. Il y avait des battles là-bas toutes les semaines. J’ai gagné mon premier battle solo là bas d’ailleurs. Il y avait le monde entier là-bas. Ça voyageait de l’autre bout du monde pour aller dans un coin d’un centre commercial et s’entraîner. Quand j’ai fait cette cover, je pensais : les mecs vous ne vous rendez pas compte que si un rappeur cainri avait fait ça vous auriez tous dit que c’est révolutionnaire. Parce que, ce que je vous donne, c’est une pièce d’histoire qui n’est pas falsifiable. C’est facile de faire un shoot mais ce qui est important c’est d’avoir un truc qui a du sens. Les mecs qui sont sur la photo c’est que des mecs qui ont représenté la France à l’international. La moitié de ces mecs a fumé des grosses têtes cainris, en compagnie de moi aussi. C’est un héritage. À l’époque où tout le monde parle de culture, moi je montre quelque chose d’important pour notre mouvement. Le mouvement est tellement un terme plus élégant et plus plus adéquat pour ce qu’on fait. Dans un mouvement, tu dois transmettre, tu dois faire. Dans une culture tu dois juste exister, tu fais partie du truc quoi.

A : Qu’est-ce que tu définirais comme un bon business move ?

L.T : S’occuper des siens, s’occuper de sa santé, prier, savoir mettre des limites à la consommation. Tu gagnes énormément en mettant de la limite sur ta consommation, que ce soit de musique, de nourriture et de beaucoup d’autres choses. Je ne prône pas un ascétisme complet mais en tout cas c’est un move qui ramène beaucoup de valeurs ajoutées à mon sens. S’occuper des siens je ne t’en parle même pas, il n’y a que ça qui compte. Régler les problèmes, c’est voir de quoi le monde a besoin et pas ce qu’ils veulent vraiment. Sinon tu deviens un troubadour. Mais de quoi le monde a besoin et trouver un moyen d’y répondre, c’est un bon business move.

« En étant unis, on est plus puissants, on est mieux, on crée des systèmes économiques, on crée des sociétés qui fonctionnent mieux. »

A : Dans l’EP ALLUME, on entend une expérimentation musicale différente que dans Business Moves. Comment as-tu conçu ce projet ?

L.T : C’est une continuité et ce n’est pas vraiment une expérimentation musicale. C’est juste que j’ai la capacité de faire tout type de son et j’aime tous les types de sons. J’aime la bonne musique, quand c’est chaud. Mais j’aime aussi quand il y a un contexte clair et précis défini. Madizm était venu au studio un jour et on discutait, je lui faisais écouter plein de trucs que j’avais. Et en fait, il tiltait sur quelques sons, moi aussi j’avais un peu ce tilt mais je n’avais pas eu de personne d’autorité comme Madizm qui sait de quoi il parle et qui te dit : « Je te dis que c’est ça que tu devrais faire ». J’adore recevoir d’ailleurs. Je suis très fan des anciens qui savent et qui ont les facts derrière eux. Mon gars Ron Brice aussi avait eu le même ressenti. Il était là en mode : « Franchement sur de la trap, comme ça un peu dynamique, t’es vraiment dangereux ». C’est vrai, j’adore faire ça ! Et c’est marrant parce qu’il y a un peu le truc du contre pied où les producteurs me disent : « Ouais je vais t’envoyer un truc à la Griselda ». Je suis fatigué de ça, je faisais du boom bap tout le monde m’insultait et maintenant tout le monde veut faire du boom bap vous êtes fatigants, c’est passé de mode, surtout de s’enfermer dans un style. Griselda, j’avais digéré et j’en avais déjà un peu marre en 2018. Big up à eux, ils sont très forts ! Dans les dernières générations, ils font partie de ce qui s’est fait de mieux. Une de mes grosses influences, c’est Kool G Rap. Il a toujours eu un style qui me parlait beaucoup parce qu’il avait quelque chose de très dynamique dans la manière. Quand tu écoutes, t’as l’impression que le mec saute partout et fait des saltos dans tous les sens en termes de technique. Dans mon break, j’ai souvent été dans cette direction aussi je voulais que ça soit bouncy funky technique et dynamique. Il y a un gars à moi, un des meilleurs breakeurs de tous les temps il s’appelle K-Mel, c’est un gars du Bronx, Boogie Brats, Zulu Kings tout ça, on l’appelle « le Michael Jordan du break » pour te dire le level du mec. Dans les années 2000, c’était impossible de trouver une cité en Ile de France sans y trouver un renoi qui dansait, qui s’habillait quasiment exactement comme lui, il a une influence gigantesque. Et ce mec là avait une phrase qu’il répétait souvent aux gens : « C’est pas celui qui fait les dynamic moves qui est le plus fort, mais celui qui a un dynamic style ». Ce n’est pas la technicité mais c’est la manière dont tu ramènes cette technicité. Kool G Rap est un peu l’épitome de ça dans le rap. En tout cas, quand tu prends le meilleur de sa discographie qui est très étendue. Mon projet ALLUME et ce style que je développe actuellement sont des manières modernes, en tout cas qui me plaît à moi, de transmettre cette exigence technique.

A : Est-ce que tu peux nous parler de Tdye La Cité qui apparaît sur « Boom«  sur Business Moves et COMMELAHAINE qui apparaît sur « Parrains » sur ALLUME ?

L.T : Tdye La Cité, c’est le petit frère de Bessy Bess de peu, il rappe aussi depuis longtemps c’est un gros MC, c’est un G comme il n’y en a pas quatre en France et c’est la famille donc c’était logique qu’il soit sur Business Moves, on a d’autres sons qui arrivent, on prépare ça. COMMELAHAINE, c’est un frérot que j’ai rencontré sur le tard et c’est timeless, ça veut rien dire le temps, c’est comme si on était ensemble depuis ! Je le trouve extrêmement talentueux, je trouve que c’est sûrement le meilleur de sa génération parce qu’il sait faire de la tech, il sait faire de la mélodie, il sait faire les deux avec goût, il est actuel sans être trendy. Et il écrit bien. On prépare des trucs ensemble qui sont incroyables.

A : Est-ce que ça t’intéresserait justement dans le rôle de transmission de produire un jeune rappeur ?

L.T : Oui, je reviens sur le même exemple, il y en a peu en France. J’utilise les référentiels qui existent. Booba, je pense qu’il a dû savoir qu’il allait avoir ça, il n’est pas étranger au mécanisme de ce game. Il savait sûrement, avant de produire son premier artiste, que les gens allaient prendre de la force et qu’après ça allait faire ceci ou cela et que ça allait vouloir renégocier le contrat. J’ai souvent entendu ce truc « mon contrat, mon contrat ». D’accord. Mais que ce soit en France ou aux States je n’ai jamais rencontré quelqu’un qui ne savait pas lire tu vois ce que je veux dire ou pas ? Chez moi on est des hustlers. Un hustler fait quoi ? Un hustler il fait du business. S’il a un produit à vendre avec une entreprise et veut mettre des tals, il crée un deal et il s’implique, il fait le truc à fond. Si, en plus, il est croyant, il doit bien compter et doit faire le deal de manière honorable. Après oui, est-ce qu’il y a eu des problèmes dans l’histoire avec des gens qui n’ont pas fait leur taf ? Si tu reviens sur l’exemple de Booba. Ses artistes il les a fait péter. J’ai toujours eu une gigantesque aversion pour les gens qui ont ce point de vue : « Ouais je l’ai fait tout seul ». En fait, vous mentez aux petits. Il y a mon gars Bakari, de Belgique, qui a fait un morceau “MENTIR AUX P’TITS”, j’ai bien kiffé ! Le plus gros taf que j’ai à faire, ce n’est pas de la transmission c’est de débunk les mensonges de ma génération et de certains anciens. Plein de mecs qui sont en mode « ouais full indé », non c’est pas vrai frère ils te mentent. Ils ont pris le premier contrat venu sous leur nez, ils ont signé comme tout le monde. Et il n’y pas de problème, ça devrait même être célébré. En fait, c’est la posture. Je n’aime pas la posture, j’aime bien les facts. Je suis très très bien placé pour en parler parce que je suis 100% indépendant, je fais tout moi même. Pas par choix. Donc si moi qui fais tout moi même, je te dis que c’est une hérésie de dire je me suis fait tout seul, comment veux tu qu’un mec qui soit signé et en plus distribué en major et “surdiffusé” partout, se soit fait tout seul ? C’est un mensonge total. Je ne suis pas arrogant, je ne dis pas que parce que je ne l’ai pas fait que c’est impossible mais tu vois derrière c’est pas comme ça. Pour ce qui est d’aider pour l’instant, j’ai eu et formé des élèves dans le break, et en général j’ai été un transmetteur de connaissances et d’opportunités à toutes les générations auxquelles j’ai été affilié. Je n’ai pas attendu d’être connu, je n’attends pas de percer pour passer le flambeau et éviter des galères aux gens qui viennent après moi, c’est le plus important pour moi. J’ai une lignée. Mes anciens sont fiers de moi et pas que ceux du hip-hop. Les anciens de la rue aussi. J’ai des chefs de gang qui me suivent assidûment et qui sont fiers de moi. J’ai des plus jeunes que moi que je booste dont je suis fier aussi, je pense que c’est réciproque et je suis très très compétitif, Dieu merci. Mais ouais dans le futur, quand j’aurai les moyens je pourrai produire, c’est sur. À la lumière de ce que j’ai dit plus haut, c’est important de le faire avec les bonnes personnes. Et surtout par exemple, COMMELAHAINE qui est un talent immense et quelqu’un de droit et de focus.

Je tiens à dédicacer chaque personne qui a fait un bout de chemin avec moi depuis mon arrivée dans ce truc, chaque personne qui m’a inspiré, que j’ai rencontrée ou que j’ai pas encore eu la chance de rencontrer.

Ma famille, et mes crews Ready To Rock (Bronx NY). Zulu Kings, (Bronx NY). 95 ZOO Banlieue Nord, Fusik (Florida), Rivers Crew (Corée du sud), Criminalz Crew, tous mes gars d’Egzagone (Esmo Ry’s Kamar Walon Casper Djibril et toute l’équipe Lyon 69), The Squadron (USA), Seven Gems (NY) Floor Lords / Flava Squad. FLOAT COMMITTEE (Manhattan NY). Black Spades, Savage Nomads, The Dirty Ones MC, La Westside Familia, Crazy Pistons.

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