BEN plg, du cœur à l’ouvrage
Interview

BEN plg, du cœur à l’ouvrage

Avec Dire je t’aime, BEN plg livrait en janvier l’aboutissement de quatre années passées à dessiner son identité musicale. Retour en longueur avec lui sur un premier album entre émotions et authenticité.

Photographies de BEN plg par Brice Bossavie pour l’Abcdr du Son.
Photographie de Lucci, Murer, Le Caméléon par Quentin Rossi.

Cela fait maintenant quatre années que l’Abcdr du Son suit la trajectoire de BEN plg. Une durée à la fois courte et extrêmement longue dans une carrière musicale, qui résonne de manière encore plus forte avec le Tourquennois : de ses premiers pas en 2019 avec son EP Pour la gloire et ses albums (qui n’en sont pas vraiment comme il le dira plus loin dans cette interview) Parcours accidenté et Dans nos yeux, jusqu’à Dire je t’aime, celui qui fut élu rappeur de 2022 par notre rédaction a pris le temps d’affiner une formule qui lui appartient aujourd’hui. 

Un rap sur le vif et à cœur ouvert, où les mots ont autant d’importance que les mélodies, qu’il affirmait encore plus en janvier avec Dire je t’aime, son premier « vrai » album. Sans jamais renier ce qui avait fait sa musique jusque-là, le Nordiste semble avoir affiné sa formule sur 14 titres, pour encore mieux raconter sa réalité. Les souvenirs d’enfance se mélangent au questionnements d’adulte, tandis que les mélodies lorgnent du côté de l’électro, de la chanson, ou même du son rap de Detroit, sans s’éparpiller. Une forme d’aboutissement qui nous a donné envie de re-discuter avec le rappeur, trois années après son premier entretien sur son début de carrière sur notre site, pour mieux cerner le chemin parcouru depuis. Dans sa musique comme dans sa tête. 


Abcdr du Son : La première chose qui m’a marqué avec ton album, c’est que tu as fait une pochette où tu souris. Pourquoi avoir fait ce choix ? C’est assez rare pour des albums de rap français. 

BEN plg : En fait, on voulait montrer un moment d’émotion entre amis. Et on a fait plein de mises en scène. Et dans tous les cas, on voulait du sourire. Parce que je trouve que les scènes d’explosion de joie sont hyper fortes et hyper intenses. Sur cette image, c’est un sourire de potes qui ont vécu et qui se sont confiés des choses. Ce n’était pas une volonté en commençant à faire les photos pour la pochette, mais ça s’est vite imposé. Quand on a vu cette image après le shooting on a direct dit « Ça retranscrit trop bien le mood de l’album »

A : Dès le début, tu as eu cette idée autour de l’expression « dire je t’aime » ?

B : Non. En vrai, j’aimerais te dire oui mais non [rires]. C’est un peu venu au fur et à mesure que j’enregistrais les morceaux. Chaque album s’ancre un peu dans une chronologie, un moment de ma vie. Et je sais qu’en ce moment je vois les chemins, les routes, avec les amis, les gens plus vieux, se modifier, s’éloigner. Tu as des gens qui disparaissent, des gens que je vois moins, et je me suis souvent fait la réflexion, à me dire « Ah putain, il faudrait que j’arrive à… »

A : À leur dire « Je t’aime » ?

B : Oui c’est ça. C’est comme si je collais un post-it pour me le rappeler. Et c’est rigolo parce que depuis que je sais que album s’appelle comme ça, je me dis des fois « Ah quand même, vas-y, abuse pas, dis-le ». Je trouve aussi qu’il y a une vraie poésie dans ce nom d’album, parce qu’on est tous d’accord avec le fait que c’est clair, il faut se le dire. Mais en même temps, personne n’ose le faire. C’est pour ça que je trouve ça fort, autant que l’action de dire « je t’aime ». Elle correspond bien au mood de l’album. 

A : L’autre chose que j’ai remarqué sur cet album c’est qu’il y a globalement une couleur… 

B : Dans les propos ? 

A : Dans les propos mais aussi dans la musicalité. J’ai trouvé qu’il y avait un son sur tout l’album. 

B : Oui je suis d’accord. La vraie différence avec cet album par rapport aux autres, c’est qu’on a beaucoup plus fait de séminaires qu’avant. On était avec Lucci, Le Caméléon, Murer, et on a vraiment fait de la musique à plusieurs. Et on a aussi beaucoup parlé : « On aimerait avoir cette couleur, on aime bien ça, ça on aime moins ». Je pense que c’est ça qui a mené à cette couleur musicale aussi. Et on a tous essayé de pousser encore plus loin nos curseurs dans ce qu’on avait envie de faire. 

A : Justement, musicalement, qu’est-ce que vous aviez envie de faire ?

B : Là comme ça je n’ai pas de définition précise. On fonctionne plus en écoutant de la musique et en se disant “Il y a telle émotion dans cette prod ça serait trop bien qu’on arrive à retranscrire ça dans notre musique”. Mais par exemple, un morceau comme « Le goût du sel » ça fait quatre ans qu’on veut le faire je crois. On voulait un morceau avec une longue intro au piano, un beat qui démarre, et moi qui vient ensuite rapper un peu plus tard derrière. On le rêvait depuis longtemps. Et quand on l’a eu on s’est dit : “Putain, ça y’est, on l’a fait les gars”. En tout cas je crois que sur cet album il y a un côté un peu plus chaud dans le son. J’aime beaucoup quand ça sonne très organique, que tu as l’impression d’entendre des instruments, que les drums ne sonnent pas trop plastique ou trop froids. 

« Dans ma tête, Dire je t’aime, c’est mon premier album. C’est la première fois que j’envoie un album où j’aime tous les titres, je le trouve cohérent. »

A : Tu as présenté Dire je t’aime comme ton premier album. Pourtant, avant ça…

B : Pas pour vous ! Pas pour vous et pour les lecteurs de l’Abcdr, c’est le troisième, vous le savez ! [rires]

A : Justement, tu considères différemment Dans nos yeux et Parcours accidenté avec du recul ?

B : Non je les adore. Mais aujourd’hui c’est plus simple de le présenter comme mon premier album. Parce que en vérité, la plupart des gens m’ont découvert sur les EPs Réalité Rap Musique. Il y a vraiment eu un avant et un après. Donc c’est plus simple de dire premier album. 

A : Donc tu considères Dire je t’aime comme ton troisième album ?

B : Non, dans ma tête, c’est mon premier album. Dans le sens où… [il réfléchit]. C’est la première fois que j’envoie un album où j’aime tous les titres, je le trouve cohérent. J’ai réécouté Dans nos yeux et Parcours accidenté d’une traite cet été, je les kiffe, j’ai trouvé ça trop beau. Mais ce sont des projets avec des imperfections, je voulais un peu tout faire. Et il y a des morceaux que je n’aime plus. Enfin que je n’aime plus. Je les aime, mais comme tu aimes ton fils borgne quoi. [rires]

A : Ton album commence avec un bruit de métronome. Pourquoi avoir fait ce choix ?

B : En fait c’est le métronome qu’on utilise pour faire du son. C’est celui que j’ai dans les oreilles quand je commence un morceau. Et ça fait au moins deux ans que je voulais faire un morceau avec ce son. Je bassinais Lucci et Murer en leur disant « un moment l’instru s’arrête, on entend le métronome, puis ça devient une batterie. » Je voulais trop faire ça, et on a essayé plein de fois sans vraiment y arriver. Et un jour, Lucci, tout seul dans son coin, fait le début de l’intro de l’album et il me l’envoie. Et quand j’ai écouté ça j’ai trouvé ça trop bien. Pour moi le métronome ça correspond au moment où tu n’as rien. Tu ouvres le projet sur Cubase [logiciel de composition, ndlr] tu fais barre d’espace, et tu entends un « tic ». C’est l’état zéro de la musique. Et quand on fait des morceaux ensemble, on part de zéro au début pour avoir quelque chose à la fin de la journée. Je ne connais pas de plus belle émotion que de voir le projet à la fin, avec toutes les batteries que mon pote a fait, les mélos que mon autre pote s’est tué à faire, et moi qui me suis arraché pour faire un bon texte. Ça donne un projet Cubase avec des carrés et des machins, mais pour moi ça représente toutes les idées de tout le monde regroupées. Et le métronome c’est un peu l’état zéro de tout ça. Donc oui je trouvais ça beau. 

A : Sur cet album, tu parles beaucoup du fait de se dire les choses entre mecs. Pourquoi avoir eu autant envie de parler de ça ?

B : Parce que je le ressens en vrai. Les deux deux couplets de “Dire je t’aime” je les ai fait en pensant à des amis à moi. Si on se disait les choses, on louperait tellement d’embrouilles. La plupart du temps, lorsqu’il y a des rancœurs, ça vient souvent d’une incompréhension. Parfois tu as juste envie que ton copain te dise « bravo », tu es frustré qu’il ne te l’ai pas dit, mais lui ne l’a pas fait parce qu’il avait l’impression que ce n’était pas cool de le dire. C’est dommage. D’ailleurs j’ai vu passer un meme sur Twitter il n’y a pas longtemps, qui disait « Venez on commente tout ce qu’on fait comme les filles font entre elles sur les photos. » En se disant « T’es trop belle », « Ma vie » [sourire]. Et c’est vrai qu’entre mecs on se donne beaucoup moins de signes d’affection. C’est beaucoup plus rare de dire à ton gars « Il te va trop bien ton pull frérot », « là, ce que tu as fait, c’est vraiment lourd, ça tue, bravo ». Alors qu’on a besoin d’être valorisés. 

A : Tu as aussi pas mal atténué quelque chose qui revenait beaucoup dans ta musique jusque là, c’est le côté « rap de PMU ». On le sent moins sur cet album. C’est quelque chose auquel tu as réfléchi ?

B : Je n’y ai pas trop réfléchi mais je pense aussi que j’ai grandi. Après ce truc de rap de PMU, moi, je ne l’ai pas inventé. Au moment où je sors Dans nos yeux, les gens disent « le rap de PMU, le rap de la classe ouvrière ! ». Au début je l’ai pris, c’était cool, les gens m’identifiaient sur quelque chose. Et puis avec le temps tu as envie de parler à d’autres gens. Quand j’ai commencé, je parlais beaucoup du Nord par exemple. Et puis après je me suis dit que j’avais envie de parler à tout le monde. C’est un peu dommage quand on dit des fois « Ah BEN, c’est vraiment le rappeur de la classe ouvrière. » Parce que tu as le droit d’être riche et de te poser les mêmes questions. Donc je pense que si on sent moins ce côté de ma musique c’est parce que je vois différemment qui je suis aujourd’hui. Et j’ai envie de parler à tout le monde. 

A : Tu parlais du Nord. Je trouve que sur ton album ou sur celui de Bekar sorti récemment, il y a des points communs. Un espèce de mélancolie mélangée à une forme de chaleur humaine dans la musique. Tu penses qu’il y a une identité dans le rap nordiste ?

B : C’est vrai que Bekar et moi on a beaucoup de connivences dans notre musique, en termes de propos, de musique, même si on ne fait pas la même chose. Et peut être que c’est lié à l’endroit d’où on vient. 

A : Même dans les sonorités, on entend un peu plus de musique électronique chez vous que ce soit toi, Sto, et un peu Bekar. 

B : En vrai, là dessus, il faut remettre le mérite à Lucci. C’est le beatmaker numéro un de cette région de France. Il a un son, il a un truc. Je ne bosse pas qu’avec lui mais il influence quand même la DA, la real’, etc. Après, traditionnellement dans le Nord, il y a de l’électro à cause des boîtes en Belgique, avec une grosse culture de la techno. Mais je ne suis jamais allé en boîte là-bas, je n’ai pas de culture techno. Sto et son producteur Lowonstage font beaucoup plus un vrai travail sur ça. Mais c’est sûr que dans l’état d’esprit il y a une culture du Nord qui fait qu’entre nous on est tranquille. Il n’y a pas trop ce truc d’égos entre rappeurs. On a quand même un truc d’entraide, de chaleur, qui est présente dans la manière dont on se comporte et dans ce qu’on raconte aussi. 

A : Musicalement, il y a aussi sur cet album un contraste entre les textes, mélancoliques, et la production, assez dansante. Ce n’est pas un album plombant alors que tu parles de choses pas forcément très joyeuses. 

A : On parlait de mes anciens albums. Pour moi ils étaient beaucoup plus mélancoliques que celui-là. Dire je t’aime, c’est un album conquérant, avec beaucoup d’espoir. Il y a plus de la nostalgie que de la mélancolie je trouve. 

« Une image qui renvoie à ce qu’on était avant ça me saute à la gueule. Des fois, j’ai l’impression de passer toute ma vie d’adulte à comprendre ce qui m’est arrivé quand j’étais petit.  »

A : Surtout, tu as réussi à avoir Niro en featuring sur ton album. Tu as un peu bouclé une boucle par rapport à ta jeunesse en tant qu’auditeur. 

B : C’était naturel que ça se fasse parce qu’on échangeait depuis un moment. À l’époque de Dans nos yeux, je le cite dans l’intro de l’album. Et ce jour là il me repartage en me remerciant pour la citation. J’étais en mode « Putain incroyable ». Suite à ça on échange un peu et il finit par m’inviter à son Zénith de Paris pour rapper avec lui. Ça sortait de nulle part, la veille pour le lendemain. C’était presque un test, du genre « est-ce qu’il est capable d’écrire un couplet la veille pour le lendemain, et de venir le rapper à mon Zénith ? »

A : Donc tu as écrit ton couplet en express ?

B : Je vais dire la vérité pour l’Abcdr [rires]. En fait j’ai écrit un couplet, j’ai commencé à l’apprendre, et là, l’expérience m’a fait me dire : « Ça va pas le faire, c’est impossible. » En vrai, avec la pression sur le moment, faire du par cœur sur scène avec un texte que tu as écrit la veille, c’était risqué. Donc j’ai fini par prendre un couplet de « Né pour briller » sur Parcours accidenté. Je ne l’ai jamais dit à Niro, donc si il lit ça, bisous frérot, tu comprendras je pense. [rires]

A : Tu te souviens du moment où tu as écouté le couplet de Niro pour la première fois ?

B : À la base c’est Niro qui m’a proposé ce morceau qu’il avait commencé avec Sofiane Pamart. J’étais dans la voiture, je l’ai mis en bluetooth, et j’ai rappelé Niro en lui disant direct qu’on partait là-dessus. Parce que c’était vraiment le Niro qui m’a fait frissonner quand j’étais petit. Je suis trop content que ça se soit passé comme ça, c’est le meilleur morceau. Après le défi pour moi c’était qu’il amenait sa vision de l’histoire et moi je ne voulais pas… En fait le truc c’est que je suis moins « rue » que Niro. Je n’ai jamais fréquenté des réseaux d’ultra près. Et je ne voulais pas me changer. C’est pour ça que je suis content, parce que je trouve que mon couplet rentre dans l’histoire tout en restant moi. Et je me suis quand même inspiré de pas mal de choses que j’ai vécues, je pense notamment à des ateliers d’écriture que je faisais avec des jeunes en établissement pénitentiaires. On s’écoutait des storytelling de Mister You ou Soso Maness, et ils étaient là, à dire « Pouah, c’est trop vrai. » Donc j’ai eu des milliards de discussions sur des trucs comme ça. 

A : Ces storytelling-là, un peu comme sur ton album, c’était ceux qui leur plaisaient le plus ?

B : En tout cas ça leur parlait pas mal. Et on a eu plein de discussions là-dessus en écoutant. « Alors là, il ment », « là, ça se passe pas vraiment comme ça ». Je ne suis pas en train de te dire que sans ça je n’aurais pas pu faire ce morceau, mais en tout cas en l’écrivant, j’ai un peu pensé à eux. Ça a aussi bouclé une autre boucle. Je me dis qu’ils m’ont inspiré sur certaines choses du morceau et je trouve ça cool.

A : Il y a un thème que tu évoques à nouveau pour la première fois depuis « Elle a » en 2020, c’est l’amour avec « Tu parles d’une blague ». Mais cette fois-ci, sous l’angle de la rupture. 

B : Pour moi ce n’est même pas un morceau de rupture. C’est plus un morceau qui parle du moment où tu es sur le point de te séparer, et tu te dis « Quand même, je kiffe. » C’est une déclaration d’amour à ce moment-là et à l’indécision qui l’entoure. Ce moment où tu as envie de dire « Je t’aime tellement que j’ai envie de repartir avec toi en fait. » J’avais plus ce sentiment-là en tête. 

A : Ça faisait quand même un moment que tu n’avais pas parlé de ce thème. Tu ne te sens pas à l’aise dessus ?

B : En fait, je pense que je suis encore pudique avec ça. L’amour c’est peut-être le sentiment le plus universel qui soit, et pourtant ce n’est pas facile de bien en parler. Et surtout, tout le monde en parle. Et souvent n’importe comment, il y a quand même parfois des morceaux de lover qui ne servent à rien. Là, je suis content parce que je trouve qu’il y a quand même un axe différent dans ce morceau-là. 

A : En écoutant ton album et ta musique en général, on a un vrai sentiment de proximité dans ton écriture, tu as l’air de rester très proche de ta réalité dans ce que tu racontes. Est-ce tu as certains proches qui ont pu se reconnaître en écoutant des passages de l’album ?

B : Non parce que j’ai prévenu la plupart à l’avance, pour ne pas qu’ils se sentent affichés. Il y a des trucs un peu durs des fois. Mais ce n’est pas ciblé je ne cite personne. Mais c’est mes potes, ils savent que je parle d’eux. Donc je préfère en général les voir et leur dire « Juste pour te dire, j’ai dit ça dans une chanson. » Mais c’est juste que… je crois que mes copains, mon entourage, ont compris qu’ils faisaient partie de ma musique. C’est pour ça que j’aime bien les avoir dans mes vidéos Repas De Famille, comme mon grand-père, ma grand-mère, ils font déjà partie de ma musique. En tout cas, ce truc de réalité, c’est ce qui m’intéresse le plus. C’est vraiment ma manière de faire de la musique. C’est comme si on était des filtre et la musique était notre analyse de la réalité. Il y a vraiment un côté thérapeutique là-dedans.

« Avec cet album, j’ai réussi à faire quelque chose que je ne savais pas faire avant : un voyage que tu peux écouter dans toutes les situations. »

A : Tu parles souvent du côté thérapeutique de l’écriture dans ta musique et sur cet album. 

B : La phase que j’aime bien aussi sur l’album d’ailleurs c’est « Je promène le chien, j’lui parle beaucoup plus qu’au psychologue. » Tu as déjà parlé à ton chien ?

A : Pas particulièrement. Mais tu n’as pas parlé de tes problèmes au chien ?

B : Si ! Je parle à mon chat et tout ! [rires] J’avais 17 ans, j’étais avec Pilou, je me promenais sur le pont du Tilleul à Tourcoing, entre Carglass et l’entrée de Wattrelos, et je racontais ma vie sentimentale. 

A : Et ça t’as aidé ? 

B : Bah oui, de fou. Parce que en fait c’est plus simple de parler à un chien. Tu sais qu’il ne te comprend pas. Il m’entendait, mais par rapport à quelqu’un qui va te comprendre, qui te regarde avec ses yeux d’humains et qui dans ta tête va peut être te juger… C’était plus dans ce sens-là.

A : Pour finir, question très importante, est-ce que tu as réussi à renvoyer ta box SFR ? 

B : Ouais.

A : Bravo. 

B : Merci ! [rires]

A : « J’ai toujours pas réussi à renvoyer ma box chez SFR mais j’ai fini mon album. »

B : Elle est bien oui ! Ce genre de phrase, pour moi, c’est les meilleures phases. Déjà parce que c’est trop dur de renvoyer une box SFR, et ensuite parce que ça réhumanise dans l’écriture. Tu es dans un moment de tension dans la chanson et d’un coup tu te prends ce truc un peu what-the-fuck dans l’écoute. C’est ce que j’aime dans l’écriture, emmener l’auditeur à droite, à gauche… Limsa le fait très bien. SCH aussi. 

A : Tu aimes bien avoir de l’humour dans ton écriture ?

B : Je pense qu’il y a de l’humour dans tous les morceaux. Ce sont des tournures de phrase. Par exemple sur l’introduction aussi, c’est très intense et d’un coup je dis « Mamie est partie avant la Jersey Drill. » C’est une manière d’écrire. Des fois j’ai ces images en tête et je me les note en me disant qu’il faut que je les mette parce que c’est rigolo. 

A : Globalement, tu as réussi à ne pas faire un album plombant au final. 

B : Oui je pense que c’est sa force. Les gens n’ont pas forcément envie d’écouter un album entier qui te plombe. Comme je disais, j’ai réécouté l’été dernier Dans nos yeux et Parcours accidenté à la suite, et il faut s’accrocher. C’est bien, mais c’est trop triste. Là j’ai réussi à faire quelque chose que je ne savais pas faire avant : c’est un voyage et tu peux l’écouter dans toutes les situations. À un moment tu regardes à la fenêtre, c’est un lac. À un autre moment c’est de la neige. À un autre, c’est des bâtiments. Tu as tous les décors différents. Et je trouve que c’est équilibré et pas indigeste. 

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