Chronique

Rocé
Top Départ

Chronowax - 2002

En 2001 son maxi Qui nous protège (incluant les titres ‘Qui nous protège’, ‘Le dernier des derniers’, ‘Plus d’feeling’) avait déjà plutôt bien préparé les foules en délire à ce qu’allait être l’album de Rocé…. Top départ. Intro sobre, pas de temps mort, la rythmique lourde installe l’ambiance sans fioriture sur fond de scratches « top départ« , « top départ« , « top départ« … Un démarrage sur deux minutes, qui laisse ensuite juste le temps à des cuivres pharaoniens d’ouvrir la route à Rocé pour le premier morceau : « Je pars sur les chapeaux de roue, les pieds dans la grosse boue, nerveux, distant mais toujours prêt à aller au bout… »

Pour qui ne le savait pas encore, le concept est clair : un beat net, une basse ronde, occasionnellement des scratches, le tout parsemé ci et là de samples se fondant dans les ambiances épurées de tout artifice superflu. C’est sur cette base que Rocé délivrera ses textes qui, à l’image des instrumentaux, ne s’embarrassent pas trop des clichés rapologiques et autres formules inutiles qui polluent le rap français. Tous les titres suivront à peu près cette ligne de conduite jusqu’à la fin de l’album, lui conférant ainsi une certaine légèreté mais également un côté parfois excessivement austère. Cette sobriété n’est d’ailleurs pas sans rappeler le premier album de Rocca (Entre deux mondes) dans un genre différent bien sûr.

Au fur et à mesure des morceaux, Rocé bâtit son édifice patiemment, instaurant diverses ambiances : tendue comme sur ‘Pire que la fiction’ ou ‘Le dernier des derniers’, teintée d’amertume sur ‘On s’habitue’ ou encore planante comme sur l’instrumental ‘Ça se passe dans l’espace’. Pour ce qui est de l’esprit global de cet album, on peut dire que sa caractéristique première est principalement sa positivité, en particulier avec des titres comme ‘Changer le monde’, ‘Qui nous protège’ ou encore ‘Dix sur dix’. Positivité toujours consciente de l’état de notre société, des mentalités qui y sévissent, mais positivité malgré tout, qui résiste à tout aigrissement. C’en est d’ailleurs la composante remarquable. Car encore une fois, le disque reste très sobre, aucun dérapage racaillesque, aucune complainte pleurnicharde, bref Rocé maintient son discours intact dans sa cohérence. On retrouve ‘Qui nous protège’ avec un certain plaisir, notamment du fait de la bonne prestation de JL (le seul featuring de l’album, en plus de l’invité surprise). Le titre sur lequel le MC se démarque le plus semble néanmoins être ‘Pour l’horizon’. Instru musical très bien mis en place, où une certaine symbiose est atteinte entre le flow, le texte, le beat et les samples. C’est là un des meilleurs titres du disque. ‘Pour l’horizon’, ainsi que ‘Ricochets’ étaient en fait déjà sortis en 1998 sous forme de maxis. Et puis enfin, l’album s’achève sur ce qui ressemble d’avantage à un track de St-Germain qu’à autre chose. ‘Plus d’feeling’ pourrait également faire penser à ‘Good morning heartache’ de Ol’Dirty Bastard, mais sur un instru de cet acabit, limite parodique, poser un texte au premier degré sérieusement comme le fait Rocé, peut friser l’autoparodie, bien que l’originalité de la démarche soit tout à son honneur.

En conclusion, le disque est loin d’être désagréable, et à défaut de « changer le monde » il apporte indéniablement une touche de fraîcheur à nos oreilles. Musicalement, un certain aboutissement est atteint en dehors de toute extravagance, le flow un peu monocorde de Rocé pouvant toutefois lasser au bout d’un moment. En somme, un opus attendu en 2002 qui à défaut de révolutionner le genre apporte sa pierre à l’édifice du rap français.

Fermer les commentaires

1 commentaire

Laisser un commentaire

* Champs obligatoire

*