Chronique

Tepr
The Deadly Master of Rappers from Hell

Idwet - 2003

Quelques semaines seulement après avoir sorti « Cluster ville » en compagnie de Lionel sous la dénomination d’Abstrakt Keal Agram, Tanguy Destable (Tepr) sort son premier album solo. Après Monopsone et Gooom, c’est désormais au tour d’Idwet de proposer les sons de ce groupe (Tepr en l’occurrence) aux influences assez éparses. Quatrième sortie du jeune label rennais, qui compte déjà l’excellent LP de Robert Le Magnifique, ce disque est, en dépit de son titre, cette fois-ci beaucoup plus estampé electronica. Si « Cluster ville » était en effet clairement orienté abstract hip hop (bien que ce terme ne renvoi pas vers grand chose), ce sept titres se veut avant tout une composition plus personnelle.

Si on pouvait s’interroger sur son contenu, « The deadly master of the rappers from hell » ne laisse planer aucun doute quant à la direction qui lui a été donné. Ainsi ‘Prairie’, le premier morceau, est composé de nappes superposées et d’un beat totalement déstructuré, très
sec, et accompagné de mélodies très finement emmenées. Difficile cependant de trouver un qualificatif ou une comparaison au style de Tepr. Décrit comme un mélange entre abstract hip hop, electronica et post rock, les sept titres semblent avant tout être des ambiances ou des atmosphères, souvent sombres, sur lesquelles sont posées des rythmes assez peu prévisibles.

Et si un léger flou règne autour du style hétéroclite de cet album, c’est
certainement dû à la volonté de son auteur, qui se plait à volontairement brouiller les pistes. Certaines mélodies à peine entamées sont ainsi brutalement stoppées pour laisser place à une toute autre ambiance. Assez exigeants, les morceaux nécessitent également des écoutes attentives pour en cerner les diverses variations, comme sur l’éclaté ‘Xerstate’.

Ces écarts de styles et de sonorités viennent du fait que les mélodies ont été crées à partir de véritables instruments : piano et guitare, et que les beats et les nappes sonnent quant à eux de manière beaucoup plus froide. Le mariage de ces trois composantes est très réussi et
le très posé ‘Nous n’y sommes pas’ en est une illustration parfaite. A l’instar de bon nombre de morceaux de « Cluster Ville », Tepr prend ici le temps d’amener les composantes de son
morceau et d’orchestrer subtilement les diverses variations qui lui permettent d’amener l’auditeur où il le souhaite. Tout en opposition ce morceau, avec le prenant ‘Tepr empereur’, est sans nul doute le meilleur des sept titres. A la fois très riche et limpide, il résume à lui seul la démarche de Tepr : un alliage de sons minimalistes qui, associés les uns aux
autres, forment un tout qui paraît finalement indissociable et dont les éléments sont parfaitement accordés les uns aux autres.

« The deadly master of the rappers from hell » comporte sept titres sombres, froids et dépouillés, à l’exception peut-être de ‘Krow ta’ où la présence de violons apportent davantage de chaleur. Mais, qu’ils soient rythmés ou plus lents, tristes ou porteurs d’espoir, tous les morceaux possèdent une mélodie propre qui capte l’oreille d’emblée. Peu de choses à redire sur ce disque donc, si ce n’est le regret de ne pouvoir entendre le reste de l’album, qui semble avoir été perdu au cours de l’enregistrement…

A l’image de « Cluster Ville », Tepr conclue son album par le très mélancolique ‘Hier soir’, tout en gradation avec ses dix notes de piano qui n’en finissent pas de monter et de descendre, nous entraînant ainsi dans des tourments qui ne s’achèveront qu’à la fin du disque… et qui reprendront peut-être dès le premier morceau du prochain album. C’est souvent triste, les belles choses.

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