Cypress Hill
Temples of Boom
Pourquoi revenir aujourd’hui sur un album vieux de treize ans ? Pourquoi évoquer aujourd’hui un groupe qui a officieusement cessé toute existence depuis quatre ans et Till death do us part, dernier long format confirmant un déclin déjà sérieusement entamé ? La réponse est simple : certaines galettes continuent toujours à nous ronger les neurones. Et Temples of Boom fait indéniablement partie de ces galettes. Celles qui ont traumatisé notre (post-) adolescence.
Là où Black Sunday, son prédécesseur, offrait un cimetière en guise de décor, Temples of Boom fait dans le tout aussi glauque. L’ambiance générale de cet album est à l’image de cette pochette qu’on regarde comme le négatif du ‘Stairway to heaven’ de Led Zeppelin. Ici les escaliers mènent droit vers l’enfer. Quelque part, ils donnent le ton.
Aucune confusion possible, Temples of boom est un album macabre et violent où la lumière et la bonne humeur sont décrétées persona non grata. L’atmosphère y est sombre et enfumée. DJ Muggs et son jeune assistant – un certain Alchemist – ne sont pas seulement les chefs d’orchestre de ce nouvel épisode ; ils paraissent tisser une toile dérivée de funk hypnotique. Le genre de toile qui s’immisce dans votre cerveau pour en immobiliser les derniers neurones actifs. Les percussions régulières d’Eric Bobo rythment ces morceaux proches d’une cérémonie mortuaire. B-Real et Sen Dog y endossent le rôle des fossoyeurs au sang froid, accompagnés dans leur œuvre par quelques invités triés sur le volet. Placés au premier plan – RZA et U-God, sur l’excellentissime ‘Killa Hill Niggas’ – ou plus en retrait – le mystérieux Capitain Pingaloca et Shag – ils enrichissent une mosaïque à la fois simple et sophistiquée.
Oubliez le « Funky Cypress Hill shit« . L’heure est aux règlements de compte et les cibles sont clairement établies. En premier chef, Ice Cube et son lieutenant Mack 10 rentrés en guerre ouverte avec les Soul Assassins. Les deux compères en prennent plein la gueule – particulièrement sur les saignants ‘No Rest for the Wicked’ et ‘Killa Hill Niggas’ – la faute à d’obscures histoires de plagiats. Les éternels wack MCs et autres flics (déjà ridiculisés sur ‘Pigs’) sont, bien entendu, également dans le viseur. On n’échappe pas si facilement aux standards du genre.
Riche en coups de sang et coups de feu, ce nouvel épisode continue également son avancée pour la cause cannabique, régulièrement soutenue. L’apogée demeurant le morceau final ‘Everybody must get stoned’. Il faut bien souffler un peu. Quelques références de choix disséminées tout au long de l’album (les Lords of the Underground scratchés sur ‘Funk Freakers’, un extrait de Pulp Fiction en guise d’introduction) achèvent de faire pencher la balance du bon côté. Temples of Boom, c’est un moine bouddhiste désenchanté avec un 22 long rifle sous le bras. En d’autres termes, un putain d’album.
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