DJ Premier
Step ya game up
Pour DJ Green Lantern, il existe deux catégories de mixtapes : les « exclusives », destinées à un public avide de nouveautés, et les mixtapes de DJ, créatives et techniques. Force est de constater qu’à l’heure actuelle, la première catégorie a pris le pouvoir. Fini les pass-pass et les blends, désormais une tape se fait sur CD, avec [HOLLA !] un hôte réputé, quelques diss tracks publicitaires [DRAMA KING !] et pas mal de [NEW SHITS !].
« Have y’all lost your fuckin’ mind men ? You cats keep discrespectin’ the game, leavin’ all that real shit out. Yo, it’s time to bring the culture back people, break your records the right way. Definition of a mixtape : scratchin’, cuttin’, mixin’. If you ain’t got that G, you got a mothafuckin’ compilation, stupid ! »
Les mots sont de DJ Premier, dans l’intro de « Step ya game up », mixtape événement de l’une des personnalités les plus respectées et influentes du rap contemporain. Ces dernières années, l’auteur des célèbres « Crooklyn cuts » s’est fait plutôt discret sur le marché des tapes, privilégiant la production pendant que les Clue, Kay Slay et autres Whoo Kid sont devenus de véritables stars dans leur domaine. Mais Preemo ne manque jamais une occasion de remettre les pendules à l’heure, comme en témoignent ses coups de gueule dans les albums de Gangstarr. Son retour derrière les platines s’annonce ainsi comme une alternative bienvenue à l’industrialisation des mixtapes.
Pour sa sélection de 19 titres, Preemo a souvent choisi ses propres productions en conviant des artistes proches de Gangstarr : Teflon, MOP, Pitch Black (avec l’excellent ‘Rep the hardest’), et les premières signatures de son propre label, Year Round Records : les NYGz et Blaq Poet, très prometteurs. Son mix est également composé de bons titres sortis des écuries new yorkaises en 2004 : ‘Never take me alive’, extrait du solide album des Young Gunz, ‘It’s over’, interpolation de David Porter sur le dernier Ghostface, ou encore le fameux ‘Still feel me’, de Jadakiss, produit par Alchemist. Outre la présence bienvenue du DITC (Diamond D et Showbiz ft. Fat Joe), on retiendra aussi l’excellent ‘Tef’s Def Jam’, sur lequel Teflon passe en revue pas moins de trente instrus qui ont marqué l’histoire du label, le freestyle de Bumpy Knuckles sur l’instru de ‘Why ?’ ainsi que ‘Super educated’, morceau pétillant de Arcee, produit par Jake One.
La style de Chris Martin est immédiatement reconnaissable, avec sa légendaire signature sonore (« Pre-pre-pre-premier« ) et de longues séquences de mix, pendant lesquels le DJ prend ses aises, en laissant le morceau s’écouler pour mieux le reprendre en vol et le brutaliser sur les one & two’s. On appréciera l’entrée en matière fracassante du DJ sur ‘Get down’ de MOP, ou encore ses scratchs bienvenus sur l’imparable ‘Hold you down’ d’Alchemist et son obsédant gimmick, pioché dans le magnifique ‘Love theme’ d’Al Kooper.
Du temps où les DJs haussaient tous leur niveau de jeu, Step ya game up aurait sans doute été considérée comme une bonne mixtape parmi d’autres. Aujourd’hui, redécouvrir de bons vieux scratchs ressemble à une bouffée d’oxygène dans un milieu où les cris ont remplacé le crissement du vinyle. Avec cette nouvelle mixtape, DJ Premier réalise un projet de bonne facture, où le mix donne une saveur d’un autre temps à une sélection actuelle et cohérente.
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