Epidemic
Somethin for tha Listeners
Epidemic, duo de MCs venus du Sud de la Floride, était apparu sur nos radars en 2011, avec Illin Spree. Un premier album somme toute assez oubliable, fait de beats solides mais manquant de cohérence et d’imagination. Ainsi, quand son successeur, Monochrome Skies, est sorti l’an dernier, c’est sans trop y croire qu’on se lançait dans l’écoute. Hex One et Tek-Nition avaient cependant progressé entre temps, et si le projet souffrait de certaines lacunes, il se caractérisait également par quelques morceaux brillants. Néanmoins, cela n’avait pas suffi à créer une réelle attente autour de la sortie de Somethin for tha Listeners, arrivé dans les bacs en juin.
Pour ce nouvel album, l’idée reste la même : confier l’ensemble de la production à un seul homme, en l’occurrence un certain Edy « Esco » Ocampo. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il s’agit là d’un choix extrêmement judicieux. De la première à la dernière piste, aucune faute de goût n’est à déplorer du côté des instrus. Mieux même, les pépites s’enchainent, toujours dans un registre résolument soyeux et jazzy. Si les claviers sont à l’honneur et l’ambiance est très homogène, Esco parvient à donner un cachet particulier à chacun de ses beats, évitant ainsi de devenir prévisible et redondant à la longue.
Il serait toutefois injuste d’attribuer la qualité de Somethin for tha Listeners au seul Esco. Hex One et Tek-Nition méritent bien évidemment quelques louanges, en premier lieu pour la direction claire et assumée de l’opus. Sur les albums précédents, le duo semblait vouloir répondre à un cahier des charges virtuel qui définirait ce qu’était un bon album de rap dans les années 1990. C’était donc un patchwork d’ambiance qui était proposé. Ici, le choix a été fait de laisser Esco faire ce qu’il sait visiblement faire de mieux, à savoir fournir des beats smooth et chaleureux. Cette atmosphère uniformément cotonneuse donne une identité forte au projet. Des DJs plutôt efficaces ont également été sollicités pour assurer les scratches. On notera ainsi une énième mais brillante utilisation de « Shook Ones pt.II » sur le bonus track « Nothin’ Matters ».
Le seul défaut un tant soit peu notable de Somethin for tha Listeners viendrait du MCing. Si Tek-Nition s’en sort plutôt bien, on regrettera un certain manque d’adaptation de la part de Hex One. Pour des productions particulièrement douces comme celles de « Bringin’ It Back », « Patience » ou « Poisonous Love », il aurait probablement fallu faire un effort pour proposer un flow moins nerveux et mécanique. Pour le reste, au niveau des textes, les deux jeunes Floridiens alternent entre egotrips (« Rhyme Writers », « Mic Masters », « Bringin’ It Back ») et récits du quotidien (« Monday to Sunday », « The Ocean », « One Life »), avec une simplicité appréciable et en évitant l’excès de punchlines.
Il ne fallait donc pas se fier à cette pochette et à ce titre tout en sobriété, pour ne pas dire désuets. Ce quelque chose pour les auditeurs a tout d’un excellent cadeau. Dense et cohérent, sorti à point en début d’été, l’album tournera assurément encore sur nos platines quand les feuilles tomberont. En attendant, Epidemic est meilleur vendeur sur ughh.com, les vidéos tournent et les retours sont pour la majorité très positifs. Qui l’eut cru il y a deux ans à peine ? Nothin’ Matters… A part le travail et la passion, quand même.
Écouter l’album ici.
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