MF Doom
Live from Planet X
Sorti en mars 2005 sur Nature Sounds (label ayant sorti certains Special herbs et le Best of de KMD), cet album live vient grossir une discographie pléthorique dont on ne semble jamais pouvoir venir à bout. Si on peut s’enthousiasmer à l’idée de pouvoir entendre Doom en live, on peut se réserver une part de scepticisme, le MC étant davantage réputé pour ses innombrables sessions studios que pour ses très rares apparitions scéniques. D’autant que ce Live from planet X semble arriver pour maintenir l’intérêt des fans, entre deux salves d’albums…
Mais peut-on se permettre de juger Daniel Dumile, personnage aussi surprenant qu’imprévisible ? Ce serait oublier qu’après ses années de silence consécutives au décès de son frère, il est revenu aussi discrètement que mystérieusement vêtu d’un masque de fer en posant ses rimes au Nuyorican Poets Café de New-York. Les soirées et les couplets passants, il préparait un retour fracassant avec comme nom de code Operation : Doomsday. C’est bien sur scène qu’il renaquit.
Et si ce live sort sous l’alias de Doom, le lieu de ce concert se passe sur la planète X, celle où les monstrueux King Geedorah (un autre de ses blase) et Godzilla s’affrontent dans des combats mortels. C’est la fusion de ses deux univers : les comics et le cinéma japonais, comme pour annoncer la couleur du contenu de ce live. Un mix de ses albums, indépendamment des alter ego et des concepts qu’il s’est créé.
Cet album, c’est donc une occasion pour MF de livrer une sorte de mini best of de quatorze titres, extraits de quelques-uns de ses plus fameux délires, d’Operation : Doomsday à MM.. Food en passant par Take me to your leader ou Madvillainy. On a beau en connaître tous les titres, cela fait toujours plaisir d’entendre ‘Greenbacks’, ‘Gas flows’, ‘Operation doomsday’ ou ‘Rhymes like dimes’, tous issus de son premier album. On ne peut aussi s’empêcher d’avoir des frissons à l’écoute d’’Accordion’ ou de l’énergique ‘I hear voices’, parfaitement enchaîné avec ‘My favorite ladies’. Un trop grand systématisme dans cette mini rétrospective altère néanmoins l’ensemble. Malgré un rythme maintenu et quelques bons enchaînements, tout repose sur l’unique éloquence de Doom. Pas de passages instrumentaux, ni même de scratches, simplement du rap. Un concert traditionnel tarifé au minimum syndical qu’un enregistrement aurait pu enrichir pour l’occasion.
Mais conquis d’avance, on ne peut s’empêcher de sourire et on veut le croire quand sur ‘Dead bent’ il hurle à s’égosiller « I will rock this microphone always !« . Malgré son âge avancé pour un rappeur cette rage transparaît jusqu’au bout du live, avec l’effrayant ‘Fine print’, qui clôt également « Take me to your leader » : « Could all get burned at the stake, send word to his closest kins, that for his sins, we claim his throne, his providence, and its citizens« . Comme un message adressé à ses rivaux imaginaires du rap game et à son public.
Si la qualité de l’enregistrement est suffisamment bonne pour se rendre compte de ce que peuvent être les rares shows de Doom, deux points assez inexplicables ternissent néanmoins l’ensemble : on aurait espéré un set dépassant les quarante minutes et non condensé en une seule piste audio…
Doom sait que le public de ce concert, comme celui qui le suit et achète ses disques depuis le début, est composé d’adeptes de raretés, de bootlegs, de mixtapes et demeure bien sûr à la recherche de lives. Il livre ce Live from planet X pour eux, et peut-être pour les néophytes, qui peuvent ainsi survoler son impressionnante discographie. Ce live, qui fait donc aussi figure de mini best of, permet de passer un bon moment, mais sa courte durée et son classicisme amènent à s’interroger sur la pertinence d’une telle sortie. Les fanatiques de Doom l’auront et l’aimeront, les autres pourront continuer à vivre sans trop de difficulté et continuer de patienter pour un véritable album.
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