Peanut Butter Wolf
Jukebox 45s
A l’heure où on s’interroge sur l’avenir du vinyle, où les grands labels font deux tiers de leurs bénéfices en ressortant au gré des modes les fonds de leur back catalogue, la sortie d’une compilation regroupant des morceaux uniquement sortis en 45 tours (7 pouces) détonne forcément. Mais depuis sa création en 1996, le label Stones Throw suit une démarche propre, atypique, à l’image de son fondateur et dirigeant Peanut Butter Wolf. Car avant d’être un DJ émérite, l’auteur de My vinyl weights a ton est avant tout un énorme collectionneur de disques cultivant un intérêt particulier pour les 45 tours.
Appliquant cette passion à son label, Peanut Butter Wolf a ainsi multiplié les sorties de 7 pouces, pressées en quantité extrêmement limité et devenant du coup un objet hautement recherché par les collectionneurs acharnés.
Cette compilation rassemble une bonne partie de ces raretés sorties auparavant uniquement sous le format 7 pouces. Un véritable acte d’intérêt public en somme. Petit voyage fantastique (comme le 45 tours sorti par Mr Flash l’année dernière) mené par un guide expérimenté (comprenez Peanut Butter Wolf) au sein d’un univers mystérieux, intriguant et diversifié. Diversifié dans l’approche musical, puisque les 22 titres composant ce Jukebox virtuel alternent entre Soul, Funk et Rap.
Le très productif Madlib, sous différents alias et occupant différentes fonctions (Producteur, MC ou DJ) est à l’origine de la plupart des morceaux de rap de cet opus. En plus des instrumentaux assurant le lien entre les morceaux (intitulés Beat Conductor) le Californien assure l’excellent remix de ‘Microphone Mathematics’ (en tant que Quasimoto), les mélodieux ‘I am singing’ (Yesterday New Quintet) et ‘Flowers’, ou encore les bien plus classiques ‘Place your belt’ en compagnie de Madephoar, ‘The Ox’ toujours avec Medaphoar mais assisté cette fois de Oh No, et On point pour son groupe, Lootpack (où il fait équipe avec Wildchild et DJ Romes). Le Loopdigga démontre une nouvelle fois combien son panel de production peut-être large (et très souvent brillant).
Jeff Jank, à la base graphiste du label, est aussi présent via sa complexe oeuvre intitulée ‘My 2600’, sortie pour la première fois en 1999. Un titre en forme d’hommage décalé à la mythique console de jeux l’Atari 2600 (enfin mythique, si vous la rebranchez, vous comprendrez tout le sens du terme obsolète.) Peanut Butter Wolf, finalement relativement en retrait, se fait le dépositaire de l’indispensable ‘Devotion 92’, une petite perle apparue pendant l’été 2000. Charizma y explose littéralement l’instru survitaminé du fondateur de Stones Throw. Petite surprise dans ce joyeux mélange de Rap-Soul-Funk la démonstration de Djing du Canadien Francophone A-Trax sur ‘Enter Ralph Wiggum’ (Ralph Wiggum étant l’un des camarades de classe de Lisa Simpson, dans la série culte de Matt Groening.)
Ce dernier a eu l’excellente idée de ressortir quelques anciens morceaux de Funk et de les ajouter à cette compilation. A l’image de la très bonne compilation de Egon, parfaitement indispensable, The Funky 16 Corners, les morceaux de Funk retrouvés ici brillent de mille feux. On ne peut que s’enthousiasmer sur le très bon ‘Take me’ des Fabulous Souls (produit par Jim Horton et Herb Miller en 1971) et ‘Color’ des LA Carnival. Deux morceaux absolument introuvables aujourd’hui en 45 tours.
Mention bien aussi au très Soul ‘Things could be better’ de Ernie & The Top Notes (assisté de Raymond Winnfiled). ‘Rocket Ship’, ressorti directement de la pièce de théatre The Spark Reality, offre un véritable délire instrumental, particulièrement surchargé et il faut bien l’admettre plutôt difficile d’accès. Enfin pour clore le chapitre des rééditions on signalera le savoureux ‘Poppin’ Popcorn’ interprété par le collectif The Highlighters. Un titre datant à l’origine de 1968 et qui avait déjà été ressorti par Stones Throw en Février 2001.
Au final, le Jukebox de 45 tours de Peanut Butter Wolf constitue donc une très belle mosaïque musicale et une nouvelle excellente sortie estampillée Stones Throw. Une aubaine pour les (nombreux) collectionneurs qui perdaient espoir et autres amateurs de compilations de qualité (véritable denrée rare aujourd’hui).
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