Nas
Greatest Hits
En tournant le clip d’’Hate Me Now’, Nas ne se doutait certainement pas que cette métaphore christique pourrait servir, plus tard, d’illustration parfaite de sa propre carrière. Après avoir été le prophète de toute une génération, son parcours professionnel s’est mué en véritable chemin de croix, et ce malgré la passion entrainée par son glorieux passé et quelques coups d’éclats épars. Miracle ponctuel sans suite, le bien nommé God’s Son clôtura la messe, et Nas alla s’enterrer avec son hip-hop après une cène sans saveur, ni disciple digne de ce nom. Avant de tenter une éventuelle résurrection, les fantassins de Columbia vont lui donner le dernier coup de lance avec un best-of aussi maigre qu’incomplet.
A l’inverse d’Hip-Hop is Dead, dont on a funestement plus parlé pour son visuel que pour son contenu musical, ce Greatest Hits va graphiquement au plus simple. Pas de tergiversations possibles sur l’artwork, c’est moche et pue à plein nez la restriction budgétaire. Au moins, cela rompt définitivement l’alliance entre Nas et son ancienne maison de disque. Il est vrai que dans les cas de divorces précipités, la coutume veut que l’artiste honore son contrat avec un best-of, histoire d’en finir une bonne fois pour toutes… Mais sérieusement, Nas ne méritait-il pas mieux que cette quinzaine de tracks balancés comme ça, à la volée ? Sa discographie a beau avoir connu de sérieux coups durs récemment, il est tout bonnement ridicule de synthétiser le talent du bonhomme à si peu. Si par nature un « best-of » est forcément réducteur, il y a tout de même une frontière entre la sélection et la négligence, que les directeurs artistiques ne se sont malheureusement pas gênés de franchir.
S’il est vrai qu’on replonge volontiers dans les tracks les plus connus du bonhomme, on regrette vite de n’avoir affaire qu’à une succession de singles. Et encore, quid de ‘Get Down’, ‘Affirmative Action’, ‘Book of Rhymes’ ? La liste des essentiels passés à la trappe est si longue, qu’on en vient à se demander si le Cd n’a pas une deuxième face, ou si on n’a pas oublié un éventuel « disque 2 » dans le boîtier…
Seule (maigre) consolation, la présence de deux inédits de très bonne facture. ‘Less Than An Hour’, enregistré pour le film Rush Hour 3, a tout du headbanger des nineties ; et tant mieux car un bon vieux single de tradition new-yorkaise ne se refuse pas ! Boosté par Cee-Lo, Nas survole la grosse basse avec une aisance qu’on croyait enfouie profond sous terre. Et comme pour confirmer ce retour en grâce, ‘Surviving The Times’ enfonce le clou (pas sur la croix, attention) et porte Nastradamus au meilleur de sa forme. Ambiance jazzy et feutrée, rythmique faussement discrète, refrain légèrement scratché… Nas est dans son élément, déroule son talent avec classe, et nous replonge avec nostalgie dans ses longues années de carrière. Et quel plaisir d’entendre Nas en si bonne forme ! De bon augure pour la suite… Comme quoi, une fois mis entre de bons beats, Nas a largement de quoi faire des miracles.
Mais deux petits inédits et une sélection vraiment discutable, cela fait malheureusement trop peu pour justifier un quelconque investissement dans ce projet douteux. L’achat est donc fortement déconseillé aux fans comme aux néophytes, tant les oublis sont nombreux.
Souhaitons à Nas dernier de rebondir vite chez Def Jam, où son prochain album, Nigger, devrait arriver dans les prochains mois… Alors que le nom du disque est déjà sujet à de grosses polémiques, Nas n’aura plus d’excuses en étant sous la houlette de son meilleur ennemi, God Mc himself.
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