Necro
Gory Days
Si vous avez déjà eu la chance d’aller à New York, vous admettrez sans broncher que la Grosse Pomme mérite l’appellation de capitale du Hip-Hop. Historiquement et culturellement New York regorge d’artistes en tout genre, la musique, et le rap, plus qu’aucune autre musique n’échappe pas à cet état de fait. La scène underground fourmille donc de talents, parmi lesquels Necro, originaire de Brooklyn, tient une place de choix.
A ses débuts de producteur pour Cage (le maxi Radiohead/Agent Orange), Al Tariq ou encore Missing Link, Necro s’est rapidement émancipé de cette image de simple homme de l’ombre, pour sortir ses projets solo. Après le premier maxi Underground/Get on your knees ont suivi quelques autres 12″, puis la sortie l’année dernière d’I Need Drugs, premier long format. Un an plus tard, revoilà Necro dans une nouvelle aventure phonographique.
Première constatation, l’univers décrit par Necro n’a pas changé, toujours à mi-chemin entre fantasme et sombre réalité (ou réalité sombre). Un condensé de provocation, plein de violence sanguinaire et extrême, du porno, des drogues et des insultes en série. Bref le rêve de cette belle Amérique puritaine (un bref coup d’œil sur www.necrohiphop.com, devrait à coup sur vous convaincre, si besoin est ). On vous laissera choisir à quel degré prendre tout ça, les âmes sensibles sont en tout cas assurés d’une bonne crise cardiaque, et donc d’une mort rapide. ’12 King Pimp Commandments’ décroche d’une courte tête la palme des paroles les plus hallucinantes. Le rap a trouvé son morceau le plus misogyne (pas un mince exploit d’ailleurs)
Remarque : si votre copine bouge la tête en s’exclamant »sympa ce morceau » c’est qu’elle ne parle pas un mot d’anglais, si elle coupe brutalement au bout de trente secondes en devenant rouge de colère, c’est qu’elle faisait ses devoirs d’anglais toute seule. Morceaux choisis: « …She was put on earth to serve man, she may enjoy a cunt lick but deep down she’ll lose respect for you man. »…, « …Don’t never strike a bitch with a pipe or a knife, only strike them to bring them back to the reality of life, toss a bottle at her, hit her with a golf club, break a mirror over her head but never let her draw blood… »
Question d’entretenir sa réputation d’homophobe radical, Necro n’oublie pas de lâcher quelques rimes acérées et explicites, comme ce « Under my cave I have a hundred ways to murder all of you gays » (‘Bury you with Satan’).
L’une des qualités de cet album tient dans le liant existant entre les morceaux. Quand I need drugs était une collection de singles jouissifs, Gory Days dégage une certaine unité. Et si les rythmes des morceaux varient, Necro pose sa voix avec une égale aisance.
Coté production, petite déception. L’ensemble est peut-être plus homogène mais on ne retrouve pas le plaisir intense des ‘The most sadistic’ et ‘You fuckin’ head split’. Plusieurs titres excitants tout de même, avec de bonnes boucles de piano comme celle de ‘Light my fire’ et son refrain à vous faire ressurgir d’outre-tombe Jim Morrison ( »Come on baby light my fire, suck my dick, come on baby light my fire, show me your tits’‘), ‘Poetry in the streets’ (en compagnie de son grand frère Ill Bill), ou encore le meilleur morceau de l’abum ‘Gory Days’. Dans un autre registre, on peut se délecter des violents et frénétiques ‘Morbid’ (déjà présent sur le dernier EP) et gonflé de bruitages en tout genre, ou de l’explicite mais lassant ‘You’re all dying’.
Malheureusement on a aussi affaire à quelques passages plus poussifs comme le ‘Circle of Tirants’, où Mr Hyde et surtout Captain Carnage font pâle figure.
Après avoir transformé le romantico-chiant ‘I need love’ de LL Cool J en un sulfureux récit de toxico, Necro poursuit dans le registre du morceau détourné. Il reprend ainsi le refrain de ‘Light my fire’ de The Doors, ou encore le fameux ‘Let’s talk about sex’ des Salt N’ Pepa sur ‘Dead Body Proposal'(sauf que là il ne s’agit pas d’un hymne au latex mais d’un récit autour d’un corps prêt pour un allez-simple direction la morgue.) Extrait: « Let’s talk about death baby, disintegration of flesh you’ll see, let’s talk about all the good things and the bad things… »
Plus uniforme que son prédécesseur, ce nouvel opus s’avère tout de même intrinsèquement bien inférieur. I need drugs était très bon, Gory Days est juste bon.
Pas de commentaire