Shadout Mapes
12 Inches Deep :The Fondle’em Issue
Lancé en 1995 par Bobbito Garcia aka DJ Cucumber Slice, Fondle’em parvint, en une demi-douzaine d’années, à s’imposer comme l’un des plus grands -si ce n’est le plus grand- label new-yorkais de musique Hip-Hop. La politique appliquée par l’animateur/journaliste/basketteur professionnel/collectionneur de sneakers n’y est en probablement pas étrangère : pas de promo, que du vynile (à de rares exceptions près), et un partage équitable des bénéfices entre le label et l’artiste produit. Elle permit en tout cas de révéler de jeunes groupes comme Mhz, Arsonists ou Juggaknots, et d’offrir un coup de pouce salvateur à de grands noms tels que Kool Keith, MF Doom ou Cage. A travers ce mix d’une grosse heure, Shadout Mapes ambitionne donc de retracer les plus grands moments de l’épopée Fondle’em.
Inutile de préciser qu’avec une telle galette, le syndrome « c’était mieux avant » finira par apparaître quelle que soit la sélection proposée : Shadout semble l’avoir compris, et il balance immédiatement les perles de deux des plus gros gâchis rapologiques de ces dernières années, Cage et Camu Tao. ‘Mersh’ du premier est probablement l’un des titres les plus angoissants et sombres de l’histoire du Hip-Hop, tandis que le mythique ‘Radiohead’ jouit d’une ligne de basse à vous fissurer un building. Camu Tao nous rappelle quant à lui qu’il n’a pas toujours été un rappeur banal, à travers la démonstration de flow de ‘Camu’, face B du premier maxi de Mhz, World Premier. Citons également les autres morceaux estampillés Weathermen, le remuant ‘The Chosen’ de Jakki da Motamouth (« I’m only friend with You cuz I wanna fuck your sister ») et ‘The Plague’ de Y@k Ballz.
Regrouper tous les classiques de Fondle’em sur un seule et même CD est tout simplement impossible, et les choix émis par le DJ prêteront donc toujours à commentaire : toutefois, Shadout s’en tire plus qu’honorablement, en ne proposant pas forcément les titres les plus souvent associés au label, mais en offrant tout de même une vision relativement exhaustive de ce que celui fut de 1995 à 2001 (on remarquera la dissemblance totale entre le tracklisting présenté ici, et celui de la compilation Farewell Fondle’em, à la visée pourtant similaire, sortie il y a trois ans par Def Jux). Comme points d’orgue du mix, retenons donc ‘Make it Happen’ de J-Treds, ‘Supadupa’ de Mr Live, et ‘Troubleman’, du groupe le moins prolifique de l’underground new-yorkais, Juggaknots.
La prestation de Shadout Mapes est pleine de discrétion et de sobriété : les enchaînements sont fluides, et l’on appréciera grandement l’intro ‘Blend’em’, très bien ficelée, faisant intervenir, par portions congrues, les instrus de quelques bijoux sortis chez Fondle’em, tels ‘Power of Nine Ether’ de Scienz of Life, ou la ligne de basse de l’immense ‘Agent Orange’ (on ne le répétera jamais assez) de Cage. Seul bémol, la présence de ‘A Day like no Other’ de Siah & Yeshua Dapoed. Certes, il fallait de l’audace pour inclure un morceau de plus de 11 minutes dans un mix. Mais le dynamisme de celui-ci s’en trouve également fortement atteint, et l’attention de l’auditeur se relâche quelque peu à cette occasion. Peut-être aurait on également aimé trouvé trace des deux maxis des Arsonists parus sur le label.
Néanmoins, voilà un outil formidable pour se familiariser avec ce que fut Fondle’em, ses grandes figures, ses mixages à l’arrache, et la passion qui émane de ces maxis. Les plus avertis apprécieront l’artwork, et pourront se rappeler au bon souvenir de l’écurie de Bobbito, dont les références, sorties uniquement en vynile pour leur grande majorité, demeurent difficilement trouvables.
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