De Gunplay à The Roots
Nouvelle sélection aléatoire de morceaux qu’on écoute en boucle. Avec Gunplay, K-Solo, The Roots, Flatbush Zombies et Django Unchained.
Gunplay & Pusha-T – « Bet that » (Cops & Robbers, 2013)
Cops & Robbers n’est qu’une entrée, un apéritif avant Medellín, le plat de résistance. En attendant Gunplay fait monter la sauce avec un mélange de resucées de grosses cartouches (« Clique », « Hold me back »), quelques couplets de fin de soirée sur des instrus légendaires (« Ghetto bird », « Ion Beg » qui reprend « Nuthin’ but a « G » thang ») et quelques inédits sanglants. « Bet that » rentre dans la dernière catégorie et conforte un peu plus ce qu’on savait déjà : Gunplay est un guerrier sanguinaire avec des cartouches de gros calibre et un barillet beaucoup trop plein. Avec la haine tenace d’un chien de la casse, il dégage une rage destructrice qui éclipse complètement Pusha T. Le médaillon MMG en étendard, il compte écarter toute rivalité pour s’imposer comme la tête la plus cramée de la scène actuelle. 50 Cent n’étant qu’une étape. — Nicobbl
Rick Ross – « 100 Black Coffins » (Django Unchained O.S.T., 2012)
L’idée de départ était simple : sortir Rick Ross de son style habituel pour placer son charisme cinématographique dans l’univers de Django Unchained. Sa réalisation l’est tout autant : un sample morriconien tout en fredonnements et sifflements de gringo sur un beat sudiste dépouillé, loin des martèlements synthétiques ou des ambiances cuir et cigares. Le résultat dépote, tant on imagine facilement Rozay à dos d’appaloosa (pauvre bête), colt pointé vers le croque-mort, réclamer une centaine de cercueils pour autant d’enflures. L’incrustation de ce titre dans une scène du film décuple sa force et révèle ce décalage entre le symbole et sa concrétisation artistique, un procédé courant dans les œuvres de Tarantino. — Raphaël
K-Solo – « Long Live the Fugitive » (Times Up, 1992)
« I’ll always write about jail » promet K-Solo au début de ce mini-titre, aussi court qu’intense, qui fait suite au « Fugitive » de son premier album, Tell The World My Name. Problème : la carrière de l’homme du Hit Squad s’est enlisée par la suite. Jusque-là, la présence carcérale a été récurrente dans ses deux albums, particulièrement avec « Premonitions of a Black Prisoner », placé juste après et auquel « Long Live the Fugitive » sert en quelque sorte d’introduction. Mais quelle introduction : sur cette boucle magique piquée à Funkadelic, la voix rauque et désabusée de K-Solo, qui a connu peu avant les « joies » de la vie derrière les barreaux, fait merveille. Un jour, on fera un article fouillé sur les rapports entre rap et prison, accompagné du mix thématique qui va avec. Un jour (peut-être). La sélection sera rude, mais « Long Live the Fugitive » a de bonnes chances d’y figurer. — Greg
Flatbush Zombies – « When in roam » (Better Off DEAD, 2013)
Flatbush Zombies voue un amour immodéré aux drogues, amour affirmé dès leur mixtape éponyme, Death and Reincarnation Under God’s Supervision. D.R.U.G.S., donc. Et de drogue il est également bien question dans cet Ave Marie-Jeanne déglingué, extrait de leur prochain opus, Better Off DEAD. Une instru voilée tout droit sortie d’un vieux film hollywoodien des années 50 ou d’un bouge bizarre de La Boca. Meechy Darko y pose sa voix pétée et s’y raconte, entre blunts et buvards. On croirait entendre scander un crackhead sans âge, en bout de course, un clochard céleste adepte de « Fibonacci in Botany. » « When in roam », littéralement « Lorsqu’en errance », reprend les thèmes chers au trio de Brooklyn : une quête mystique et quasi religieuse initiée par l’usage de stupéfiants, et l’appel de la mort. C’est sombre, glauque, étrange et pathétique, mais ça marche. « Sing sorrow and the whole world’ll follow » termine Erick Arc Elliott. Il n’a peut-être pas tout à fait tort. — AL
The Roots – « Rising Down » (Rising Down, 2008)
Il y a des morceaux qui, lorsqu’on les entend pour la première fois, font l’effet d’une enclume s’écrasant violemment contre le canal auditif. De ceux qui, trop entêtants, sont voués à subir le repeat one souvent au delà du bon sens. « Rising Down », morceau éponyme du huitième album studio de The Roots, en est. Une entrée démentielle de Mos Def, un couplet chirurgical de Black Thought, une sortie désabusée de Styles P, le tout entrecoupé par le refrain hypnotique de Dice Raw et martelé sur un instrumental aérien d’une lourdeur sans nom. Ici aussi le ciel est sur le point de s’écrouler, Dieu est sûrement trop occupé pour décrocher le combiné. — David²
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