L'année héroïque d'Orelsan
C’était le soir du 15 mars 2018. Au bout de quelque chose comme une heure et trente minutes de concert, OrelSan entamait le long couplet sans refrain de « Notes pour trop tard ». Entre temps, il avait commencé avec les variations de flow intempestives de « San », renfilé le masque de gourou intergalactique pour « Raelsan », vidé sa bile familiale sous les auspices de sa grand-mère sur grand écran, et partagé la scène avec Nekfeu et Dizzee Rascal. Sans backeur, sans perdre un mot. À la fin du concert, maitrisé de la première note aux derniers « merci », un sentiment s’est imposé : caché derrière sa nonchalance sur disque, OrelSan est actuellement dans l’élite des meilleurs rappeurs francophones. Et il ne s’agit pas là de souligner son évident succès commercial, couronné de diamant en juin. La direction musicale aboutie de La Fête est finie l’an dernier indiquait déjà un artiste arrivé à maturation, et magnifiée sur scène par le travail sonore de Skread et les autres musiciens qui l’accompagnent. Mais la prestation scénique d’Aurélien Cotentin, réitérée sur plus d’une soixantaine de dates sur scène cette année (dont une poignée de fois face à l’auteur de ces lignes), finit par convaincre qu’il est parvenu à la totale maîtrise de son rap. Les onze morceaux plus énergiques et enlevés réunis sur Epilogue confirment sa palette technique, mais le constat pourrait s’appliquer sans. Il y a quelques années, Rocca, rompu aux scènes d’ici et d’ailleurs, nous avait affirmé que c’était sur scène que se mesurait la véritable valeur d’un rappeur. Celle d’OrelSan se cache dans les deux premières lettres de son nom. – Raphaël