De Nappy Roots à Onyx
Souvenirs adolescents, grands perdants et dernières nouveautés bouleversantes : notre dernière sélection ne manque pas de grands sentiments.
Nappy Roots – « Beads and Braids » (The Humdinger, 2008)
Les cinq membres de Nappy Roots sont à la fois précurseurs et grands perdants du revival country rap tunes amorcé à la fin des années 2000. Avant Big K.R.I.T. ou Stalley, le quintet du Kentucky faisait déjà dans la relecture appliquée des standards du rap sudiste. Le succès du single « Awnaw » en 2002 ne leur assurera pas une reconnaissance à long terme. Dommage, car au hasard de leur discographie, on peut retrouver de véritables perles, comme ce « Beads and Braids » à la vibe dungeon family-esque, extrait d’un troisième album passé autant inaperçu que le quatrième. — JB
United fools, ft. Sir Jean & Art Melody – « Human projects » (Human projects, 2012)
Il y a la théorie, les intentions et les faits. Un patchwork d’influences, traversant les continents et époques, partagées au cœur d’un sextet uni. Une volonté de s’interroger sur la place du collectif dans un univers individualiste. Une kyrielle de bonnes intentions qu’on voyait étalées tout au long d’un album… affreusement poussif. Heureuse surprise, Human Projects regorge de bons moments. À commencer par son premier extrait « Human Projects » avec Sir Jean et le burkinabé Art Melody dont la gouaille illumine cette constellation conceptuelle. Une injection de sens quasi-dénuée de samples. — Nicobbl
K7 – « Come Baby Come » (Swing Batta Swing, 1993)
Parce que l’été 1994, l’argent de poche gagné en déboisant les Landes, les belotes coinchées à la lampe à pétrole, les Reebok noires du P’tit Kader (futur tox’ incarcéré, snif snif) interdites de tente en Auvergne, le coup-franc brossé de Stoichkov retenté matin, midi et soir, le train jusqu’à Genève, la première boule à zéro décapée à l’after-shave, la mode des lancers francs depuis la raquette adverse – et les œufs sur le ballon qui en résultaient -, les 24/24 de Super Mario Kart sous pizzas, Coca et jumbos de pop-corn, et cet album qu’Aziz ramenait de Montréal, à jamais bloqué sur cette fameuse piste 1. — Anthokadi
Trae Tha Truth – « R.I.P. Clip D » (2011)
Novembre 2011, Money Clip D, l’ami et bras droit de Trae, est tué à la sortie d’une boîte de nuit. Décembre 2011, la voix la plus éraillée de Houston enregistre un hommage sur l’instru de « Look What You’ve Done » de Drake. Dans ce moment sombre, Trae délivre un morceau bouleversant, à l’émotion qui prend aux tripes. Pas de refrain, pas de postures, pas d’effets de manche, juste sa peine et son amour pour son pote disparu. Dans ces circonstances malheureuses, le rappeur montre une fois encore l’étendue de son talent lorsqu’il pose sur des productions taillées pour lui, c’est-à-dire lentes, funèbres, délicates, et qui tranchent avec sa voix si rugueuse. Un bel adieu. — David
Onyx – « Last Dayz » (All we got iz us, 1995)
Pour de nombreuses personnes, un morceau d’Onyx, c’est des mecs qui hurlent qu’ils sont de vrais sociopathes sur un beat tapageur. Mais dans « Last Dayz », c’est plus le désespoir d’être enragé que la rage du désespoir que les trois crânes rasés du Queens font résonner. La verve est la même, comme en témoigne l’entrée de Fredro (« I’m America’s nightmare, young black and just dont give a fuck, I just want to get high and live it up« ), mais le ton est lui plus résigné. Est-ce l’association de Bob James et Aretha Franklin sur une rythmique distante et essoufflée ? Jamais le noir de l’onyx n’a semblé si terne d’abattement. — Raphaël
Merci à Aziz, je ne connaissais pas ce morceau !