The Jacka
Tear Gas
Pittsburg, California. A la fin des années 90, C-Bo monte un groupe de têtes cramées qui gravitent autour de lui. Des stick up kids, des dealers, des zonards habitués à passer par la case prison. En un mot, la relève. Ils se nomment Husalah, Fed-X, AP-9, Rydah J Kydah et The Jacka. Leur premier album, sous l’égide de leur mentor, est un succès immédiat. Une nouvelle légende de la Bay Area est née : Mob Figaz. Leur style est brutal, immergé complètement dans leur monde, celui de la rue, du deal, des meurtres, des territoires, de la coke et du crack. Épiphénomène régional extraordinaire, ils vont continuer d’abreuver la côte ouest des États-Unis pendant une décennie quasiment sans s’arrêter si ce n’est pour refaire des petits tours derrière les barreaux.
The Jacka est sûrement le plus talentueux du groupe, suivi de près par Husalah. Avec deux albums solos au compteur dont le déjà classique The Jack Artist, il n’a plus besoin de prouver ses qualités musicales. Son univers est sombre, presque emo, non sans rappeler les meilleurs du genre côté Est comme The LOX ou State Property. Appuyé par sa voix éraillée, The Jacka touche direct à l’essentiel avec un charisme naturel. Alors lorsqu’il revient quatre années après, il a un défi à relever : faire l’album qui va le propulser hors de la région, le faire connaître nationalement et emmener toute la Bay avec lui.
Tear Gas fait l’objet d’une campagne de publicité sans précédent. L’ambiance est apocalyptique, effets spéciaux, guerre civile, 2012 sans les blagues. Pourtant le contenu n’est pas si « fin du monde » que ça. On se retrouve plutôt devant un savant mélange de hits en tout genre saupoudrés de morceaux plus introspectifs comme The Jacka sait si bien les faire. Comme souvent sur les albums des Mob Figaz, Tear Gas est une suite de featurings assez hétéroclites. Passant de ses collègues Mob à ses illustres compatriotes de la Bay mais aussi de toutes les régions importantes des USA, le casting s’approche de la perfection.
Alors que cette diversité un peu touche-à-tout pourrait faire croire à une énorme compilation sans queue ni tête, Jacka en ressort un album construit et fort comme un véritable chef d’orchestre. Son aptitude à jouter de la même façon avec les Strong Arm Steady, Zion I, Mistah FAB, E-40 ou Cellski, prouve encore une fois que les clivages entre les sous-genres n’ont vraiment pas lieu d’être au sein de la Bay Area. Encore plus fort, ses collaborations avec Cormega ou Freeway nous transportent carrément à New York ou Philly, un aller-retour sans décalage horaire. The Jacka fait alors penser à une version bonifiée de Saigon, s’acclimatant complètement à l’ambiance dure et froide du son de la côte Est. Dans ses meilleurs moments crossovers, il réalise ainsi des grands écarts qui paraissent naturels entre les délires enfumés et libidineux de Devin sur ‘Keep Callin’ ou l’anthem hip-hop, basique par excellence avec Planet Asia sur ‘The Movement’.
The Jacka a de nombreuses qualités mais celle qui cimente vraiment l’ensemble est son sens du refrain entêtant et musical. Impossible de se les décoller du cerveau tellement ils sont simples et efficaces, par exemple sur ‘Won’t be right’ ou ‘Just a celebrity’. Son flow tout-terrain est vraiment plaisant tout comme la diversité des productions. Traxamillion se démarque encore une fois avec deux hits en puissance : ‘Glamourous Lifestyle’ aux basses dévastatrices, avec le mythique Andre Nickatina kidnappant carrément la vedette le temps d’un couplet et le parfait ‘Girls’, remake survitaminé du classique old school des Beastie Boys. A l’inverse, d’autres morceaux sont de vrais bijoux de rap de walkman comme l’onirique ‘Dream’ avec Zion I et Ampichino ou le lancinant ‘Doppest Forreal’. Quasiment tous les morceaux peuvent être cités pour la qualité de leur production, leur interprétation ou la force qu’ils dégagent. Étonnement, une bonne partie de l’album est composée de productions plutôt classiques, rappelant un certain âge d’or des 90’s mais l’interprétation de The Jacka les rend complètement intemporelles et sans réels repères géographiques.
Tear Gas est l’album de la consécration pour The Jacka. A part peut-être le single R’n B-isant ‘All over me’ relégué en dernière position, il n’y a aucun morceau dispensable. Sans fautes de goût, il réalise un véritable tour de force dans l’indépendance la plus totale. Tirant à vue dans toutes les directions, du club à la rue, de New York à Los Angeles en passant par Houston, The Jacka est en passe de devenir la nouvelle tête d’affiche de la Bay Area. En restant proche de ses racines et de son public tout en s’ouvrant à de multiples horizons, il montre le chemin de ce que peut (doit?) être l’artiste rap de la prochaine décennie. Et aux vues de sa productivité et des chiffres très intéressants qu’il réalise, nombreux sont ceux qui devraient s’en inspirer.
La chronique est bonne mais je suis pas d’accord sur tout. « All Over Me » certes très commercial est pour moi LE morceau, c’est une tuerie. Matt Blaque livre un refrain de qualité comme d’habitude.
De le placer comme le meilleur du groupe, encore une fois mais alors pas du tout d’accord. Et la suffit juste d’être objectif, Ap.9 est de loin le meilleur, il à tout pour lui. Husalah viendrait peut être ensuite mais Rydah J.Klyde est meilleur pour moi. Mais AP est de loin le meilleur, son flow, ses textes dégagent un truc que les autres n’ont pas. Il est touchant, il est émotionnel si puis je dire. Puis il est très diversifié, ses albums sont de bonnes fractures. The Jacka peut parfois être moyen voir mou. Il a une excellente discographie, des bons textes, refrains, une bonne aura… Mais en terme de talent, c’est pas comparable.
Les Mob Figaz en groupe ou solo n’ont jamais explosé et pourtant le talent était la. Les hommages en son nom sont d’excellentes fractures, le dernier d’AP entre autres sur son dernier album est lourd. Rydah J.Klyde pose un bon couplet aussi auprès de Nef The Pharaoh sur un son en hommage au Jacka.
Peace