KRS-One
Life
Depuis quelques années, la carrière de KRS One se cherche. Disons depuis I Got Next, en 1997, et le départ de chez Jive. Galères de label, albums qui se succèdent sans briller à cause de productions peu inspirées (y compris de la part de l’intéressé), rédemption lourdingue (Spiritual Minded venant racheter Criminal Minded). Bien que Kris ne soit jamais vraiment parti, Life marque une sorte de (nouveau) retour.
Sans fioritures, le retour. Clarté du titre, sobriété de la pochette, simplicité de la construction. Pas d’intro, pas d’outro, pas d’interlude. Des titres courts ne comportant parfois qu’un seul couplet (l’excellent ‘Life Interlude’). Pour accueillir le rappeur du South Bronx, un nouveau label, le bien nommé Antagonist. Pour remédier au déséquilibre sonore de ses opus précédents, une seule équipe de producteurs, The Resistance. Pour l’accompagner au micro, une poignée de featuring conviant des membres d’un même groupe, The Footsoldiers. Le credo ne change pas : « Hip Hop is not a product ; Hip Hop is you and me« .
Et ça fonctionne. « Life » est un album solide, compact (à peine 44 minutes), homogène. Kris Parker s’y montre en très grande forme, pour ne pas dire imprenable. Sa diction est toujours claire, son placement toujours précis, sa voix toujours puissante. Maîtrisant parfaitement son sujet sur du boom-bap offensif (‘I’m On The Mic’), il ne cesse pas cependant à varier son phrasé, que ce soit pour l’adapter au tempo frénétique de ‘Gimmie Da Gun’, ou pour rappeler par des jeux de sonorités que tout ce qui brille n’est pas or sur ‘Bling Blung’.
Le travail de The Resistance a globalement su trouver un bon équilibre. D’un côté, une bonne partie des instrus repose sur une formule aussi éprouvée qu’efficace. Un beat sublimé par une descente de cuivres grandiloquente permet à KRS d’exceller dans le récit de soi (‘My Life’). ‘Fucked Up’ squatte les plates-bandes de DJ Premier, pendant que dans un autre genre, ‘Still Slippin’’ ramène dans les eighties avec un son old school qui recycle la guitare du ‘Pass The Mic’ des Beastie. Sur plusieurs morceaux, l’alchimie est parfaite. ‘I Am There’ : narration inspirée, boucle entêtante, variation impeccable pour le refrain. Du grand art.
On n’en dira pas autant de tous les refrains, loin de là. On regrette en effet quelques fautes de goût en la matière, venant par exemple ternir le très bien foutu ‘Freedom’. Ailleurs, KRS One se fait tacticien. Sur ‘The Way We Live’ notamment, il prend appui sur un beat réservé habituellement à des textes plutôt légers pour mieux dénoncer l’inconsistance politique de ses collègues. Dommage qu’il se fasse prendre en partie à son propre piège : un refrain poussif, encore une fois. Si quelques productions peinent à convaincre (l’irritant ‘Mr. Percy’, par ailleurs décevant sur le thème du chômage et de la pauvreté ; le vaguement rock ‘I Ain’t Leavin’’), KRS rattrape presque toujours le coup (sa performance impressionnante de vélocité sur ‘Woke Up’).
« Return of the boom-bap means just that…« . Vous avez mis de côté la nostalgie des fraîches années, et escomptez seulement un bon album de KRS One ? Le voici.
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