Airborn Audio
Good Fortune
En combo, solo, featuring, sur album, EP, maxi, mixtape, single, en édition spéciale, limitée ou remix : les sorties frappées Anti-Pop Consortium ont toujours su capter l’intérêt depuis la sortie de The isolationnist avec DJ Vadim en 1999. Si depuis les projets se sont succédé dissemblable ment, une touche APC se fait néanmoins sentir quoiqu’il arrive, garantissant quasi à coup sûr la qualité du contenu… Des années qu’on attendait le retour d’Antipop consortium. Ou de ce qu’il en reste. Depuis 2002 et Arrhythmia. Airborn audio se mue alors en phoenix, High Priest et M. Sayyid venant souffler sur les cendres et attiser les braises au dessous.
Si Beans s’est rapidement évertué à sortir des solos : Tomorrow Right Now, les EPs Crane wars et Now, soon, someday ou son récent Shock City Maverick, ses deux anciens compères ne lâchaient que des titres au compte-gouttes sur mixtapes, faisant grandir notre attente et notre scepticisme… Finalement sorti, et en terre fertile (sur Ninja Tune), on pouvait s’attendre à un album peaufiné à l’extrême où le duo aurait pris soin de tout peser, et repeser, pour maintenir ce subtile équilibre entre Hiphop et l’electro trouvé depuis Tragic epilogue.
Mais bien qu’annoncé par les deux membres comme le Tragic epilogue version 2005, Good fortune n’arrive toutefois pas à soutenir la comparaison avec APC. Les hommes et la recette restent certes les mêmes : de la compo aux claviers et une MPC sans sample, mais là où APC triomphait Airborn audio semble se perdre. Sur Arrhythmia, par exemple, les sons s’entrechoquaient, et du tumulte émergeait un ordre rythmé où les MCs pouvaient jouer avec les sons. Sur Good fortune ceux-ci ne font que s’additionner. High Priest et M. Sayyid se sont pourtant donnés les moyens : deux ans de studio et un contrôle de la conceptualisation tortueuse à la finalisation concrète de l’album. Les deux rappeurs produisent en effet comme à l’habitude mais s’occupent en plus du mixage et de la réalisation entière.
D’APC à Airborn audio, de Tragic epilogue à Good fortune, seuls les noms ont vraiment changé. Mais quelque chose s’est perdu en route… Beans peut-être? Peut-être aussi que l’album aurait davantage enthousiasmé il y a trois ans, à l’heure où ces sons étaient avant-gardiste. Sans non plus être mauvais (loin de là), on pouvait espérer beaucoup mieux dans l’ensemble. Si on regrette les envolées de M. Sayyid, High Priest nous gratifie lui de bons moments, notamment sur l’excellent ‘The best shit in the world’ ou sur le dépouillé ‘Inside the globe’. Sur ce titre (avec un clin d’œil à Rencontre du troisième type) ou encore ‘Wings’ on retrouve bien les délires propre à APC : instru minimaliste et raps en décalages. Même recette pour le superbe ‘Now I lay me down’ : petite mélodie accompagnant à merveille les raps de Priest et Sayyid et qui en fait le meilleur morceau de l’album.
Mais, ces quatre titres mis à part, l’ensemble parait assez mou, limite soporifique par moments même. Comme sur le cotonneux ‘NYC’ ou le faussement décalé ‘Bright lights’. ‘My eyes’ ou l’intermède parodique ‘Know who you are’ semblent même être de trop.
Si APC a toujours manié minimalisme electro et Hip-Hop avec réussite, celle-ci venait aussi des basses lourdes posées sur les instrus. Rien de cela sur Good fortune, et ça explique le fait que l’album semble étiré en plus d’apparaître assez languissant. Trop d’effets, trop de filtres et de bidouillages. Trop d’efforts pour se démarquer aussi, peut-être. Ce qui a fait l’originalité d’APC passe aujourd’hui pour un trop. Good fortune souffrira de l’usage du temps, là où les sorties d’APC restent comme des classiques et une inspiration pour beaucoup. Les effets reverse sur les voix, les echos, les delays usés et abusés ne provoquent plus la même réaction et relaient souvent la musique au second plan. On aurait préféré quelque chose de plus spontané et d’un peu moins conceptualisé pour le coup. Prenons donc Good fortune comme un premier test avant les solos des deux compères, pour faire contre bonne fortune bon coeur…
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