Coucou Chloe, fièvre créatrice
Classer la musique de Coucou Chloe n’est pas une chose aisée. Il faut dire que depuis sept ans maintenant, cette productrice et interprète française basée à Londres ne cesse de brouiller les pistes sur les délimitations sonores de ce qu’elle sort à intervalles réguliers. Révélée en 2017 avec son morceau « FLIP U » et son étrange clip dans une patinoire, Erika Jane n’a depuis jamais cessé d’explorer les frontières existant entre le monde de l’electronique et du rap, accompagnée de sa voix susurrée. En solo sur plusieurs EPs, mais aussi aux côtés de NUXXE, un des labels musicaux les plus excitants de ces dernières années pour ses réactions chimiques sonores, qu’elle a cofondé avec le producteur Sega Bodega, la chanteuse (aussi française) Oklou et la rappeuse Shygirl depuis Londres. Malgré tout ça, les sorties de Coucou Chloé se limitaient jusque-là à des (nombreux) singles et quatre EPs à la durée en dessous des vingt minutes. Dévoilé au début du mois d’octobre, le premier vrai « long » format de la Française (25 minutes) vient finalement parfaitement remédier à cette frustration.
Long de dix morceaux, FEVER DREAM vient solidement ancrer toute l’inventivité de la musique de Coucou Chloe, déjà saluée de l’autre côté de la Manche, à l’image du magazine Mixmag qui lui offrait sa couverture dans le pays en mai dernier. Entre sonorités club, influences de la bass music anglaise, et productions trap étouffantes, la productrice montre ici toute l’étendue de ses capacités et de ses influences entraperçues ces dernières années. D’un titre dansant aux basses martelées (« DRIFT ») on passe à des morceaux trap synthétiques et décharnés en compagnie de Brodinski (« IDK », « BEEF IT UP ») avant d’aller vers du rap blindé de basses saturées (« WEDDING CAKE » avec la rappeuse japonaise NENE) ou lancinant et menaçant sur « ICE CASTLES » avec le jeune rappeur américain Matt Ox. En jouant encore plus avec les genres, Coucou Chloe confirme finalement sur FEVER DREAM ce que l’on sentait déjà dans tout ce qu’elle faisait ces dernières années : un véritable désir de faire ce que bon lui semble, sans se soucier d’être catégorisée. À l’écoute de ces nouveaux morceaux, la mission devient – et c’est une qualité – encore plus compliquée.