Chronique

DJ Nemo & DJ Battle
Heavyweights champs

Autoproduit - 2003

Dans le coin droit : DJ Nemo ! Dans le coin gauche : DJ Battle ! Accusant 90 minutes à la pesée, Heavyweights champs réunit sur le ring, pour un match d’exhibition, deux DJs tirant tous deux dans la difficile mais convoitée catégorie ‘mix US’. Et pour l’occasion, les champions ont décidé de convier les poids lourds de l’underground américain. Avec à leur palmarès la mixtape Funky Jazz flavor, les deux DJs décident ici de rechausser les gants pour deux nouveaux rounds avec une sélection aussi ambitieuse qu’agrémentée de petites surprises… Ready ? Boxe !

En guise de shadow-boxing, le premier round débute tranquillement par un petit mix de hits des dix dernières années. Clin d’œil obligé aux auteurs de ‘Same as it ever was’ (et sa célèbre pochette avec son violent crochet du gauche) d’House of pain et à leur infaillible ‘Jump around’, afin de donner le ton des deux manches qui vont suivre. Bref, une intro idéale pour un échauffement, qui fait progressivement monter l’adrénaline jusqu’au premier coup asséné : le percutant ‘Wylin’ you’ de Mos Def & Diverse. Pas de séance d’observation donc. A première vue, les automatismes sont là et la complimentarité, évidente. Deux qualités semblent toutefois essentielles pour tenir la distance dans ce genre de combat : le punch, nécessaire pour donner du tonus au mix, et surtout l’endurance, afin de le maintenir à niveau durant ces deux longs rounds. Pour y parvenir, quelques petits medley des meilleurs titres des artistes sélectionnés, à l’image des extraits du superbe Soon come… d’Unspoken heard, viennent par exemple apporter du swing au sein du mix. Plus technique et efficace que donneurs de coups inutiles, les deux DJs savent porter leurs attaques lorsqu’il le faut, sortant quelques uppercuts ravageurs comme l’excellent remix de ‘Make the music’ de Lexicon & Demigods. De brillants assauts ainsi portés et projetent l’auditeur directement dans les cordes. Pour s’en dégager, rien de mieux que le léger ‘Beyond’ de DJ js-one et OC et son piano qui nous fait immanquablement baisser la garde. Imparable. Et, si on a pu tant bien que mal esquiver les coups jusque là, on ne peut que se résigner à encaisser au moment où les DJs sortent leur arme secrête. Busdriver évidemment avec son splendide ‘Imaginary places’ tout en accélérations et en feintes, et qui aura raison de notre résistance et de nos veines parades. L’allonge, beaucoup trop longue pour pouvoir être éviter, ne permet aucune anticipation, ni aucun dégagement. Rien n’est possible face au flow du challenger des MCs de la côte ouest en 2002. Il est grand temps pour nous que sonne le gong…

A peine le temps de retourner la tape, que le second round doit commencer. Petit conseil, bien songer à remettre son protège dents car il faut se préparer à recevoir à nouveau 45 minutes de gros sons. Et particulièrement lorsque l’on redémarre sous les mêmes auspices où l’on avait terminer la première reprise. Côte ouest bien sûr, avec le rythmé et énergique trio d’Ugly duckling, en featuring ici avec Puts, qui vient tester notre jeu de jambes avec le remix de ‘A little salsa’, du très frais ‘Journey to anywhere’. Si vous imaginez après ça qu’une quelconque riposte est possible, travaillez vos déplacements car Slug (Atmosphere) avec son ‘Twomosphere’ vous fera regretter d’avoir eu la prétention d’être venu le défier sur le ring. Visiblement plus offensifs que le lors du premier round, Nemo et Battle maîtrisent parfaitement leur sujet, cela n’empêchant pas toutefois certains combattants d’omettre quelques points de règlements en venant porter une série de coups peu fair-play. C’est notamment le cas de l’ex-Company flow Mr Len en featuring avec Mr Live & Jean Grae, qui viennent tous trois asséner un freestyle live dantesque enregistré lors d’un show HHresistance. On est compté après cette véritable bagarre de rue, et nos oreilles ressemblent alors plus à un sac de frappe qu’autre chose. S’en suivent quelques énchaînements bien sentis, sans perte de puissance, lorsque les deux combattants nous laisse enfin reprendre notre souffle lors du break ‘Puts ain’t playin » qui vient en douceur préparer le terrain à ‘The La Song’ des People under the stairs. La tape se finie en beauté par une succession de trois excellents titres : l’inévitable El da Sensaï, le ‘Solar powered’ de Binary star et ‘Rythm like a scientist’ de Third sight, histoire de prendre définitivement l’avantage aux points.

A l’issue d’un combat, qu’il faut bien admettre déséquilibré, on est contraint de jeter l’éponge et d’encaisser bon gré mal gré le Knock-Out. Profitant de la moindre ouverture et sans agressivité, Battle et Nemo proposent sur Heavyweights champs une sélection irréprochable, sans effet de manche et avec quelques remixs de très hautes tenues. Cette excursion dans le noble art devrait sans nul doute séduire les spectateurs de ce vaste championnat qu’est celui de la mixtape, et renforcer l’impression que celle-ci a la carrure pour prétendre à la ceinture en ce début d’année 2003. Un petit conseil toutefois, à son écoute, si vous sentez que votre voisin ne fait pas le poids, nous ne saurions trop vous conseiller le port du casque…

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