« Bande organisée », premier extrait de la compilation 13 organisé
S’il est permis de douter de la pertinence de ses propos sur le coronavirus, ces derniers temps Akh n’a pas dit que des conneries. Notamment, dans une interview donnée à Le Bon Son, à propos de la magie des collectifs : « le public adore les collectifs ! Pourquoi ? Parce que la nature humaine aime que des gens se rassemblent pour faire de la musique. » C’est vrai, et les annonces, coup sur coup, de l’enregistrement de Chroniques de Mars vol.3 (contenant le featuring le plus napolitain de l’histoire, Akh et SCH), et d’une compilation d’artistes marseillais de la nouvelle génération drivée par Jul ont suffi à égayer cet été 2020 rongé par pandémie et autres nouvelles de merde. Après 93 Empire, la concentration d’artistes identifiés dans le 13 avait évidemment fait espérer une telle entreprise. Et qui d’autre que Jul, plus grand vendeur de l’histoire du rap français, héritier iconoclaste du Rat Luciano, pour la mener ? Si on n’imagine qu’à peine l’ampleur des tractations diplomatiques à l’œuvre pour faire poser ensemble des gens au passif tourmenté, le seul fait d’y arriver suscite l’enthousiasme. Ça ne garantit pas à coup sûr de la belle musique, mais quelque chose de beau quand même. D’avoir réuni tout ce monde sans giclée de sang notable n’est pas le seul record de l’initiative. Sur le premier extrait, un posse-cut (le sud-est, ancienne et nouvelle génération, affectionne toujours les posse-cut) qui démarre par SCH sur une prod presque caricaturalement « Jul », l’Aubagnais débite plus d’expressions locales dans ce 16 que dans toute sa carrière ; Kofs explose le « nique ta mère t’auras des Nike Air nikoumouk t’auras des Reebok » de Seth Gueko avec une expression du même acabit, dans une rentabilisation optimale de sa voix de Garou du côté obscur. Réconciliation hautement symbolique, Naps enchaîne après Jul, et c’est toujours plaisant d’entendre l’auteur de Ma ville et ma vie rapper – malgré une phase louche sur un coup porté à une personne portant du mascara. Quant à Soso, même si la médaille d’or de ses entrées revient toujours à « Code 120 » (où il arrive « en frein à main comme A$ap Rocky sur « F**king problem » mais avec le « HAAN » de French Montana » selon les mots de son ex-codétenu, Chris Karjack), ce genre de couplet insolent, presque pittoresque, lui va à merveille. La deuxième partie, constituée d’Elams, de Solda (Guirri Mafia) et de Houari de Ghetto Phénomène est en dessous d’un point de vue de la qualité du rap et rend, aux premières écoutes, le titre hétérogène. Elle fait regretter que « Bande organisée » ne se soit pas enregistré dans les mêmes conditions que « Le Retour du shit squad » en 1998 : avec une ambiance d’équipe purement spontanée. Reste que la promesse est magnifique, le clip arracherait un sourire à l’entraîneur du Barça le lendemain du match contre le Bayern. Alors, vive le rap marseillais, vive les gens qui font de la musique ensemble.