RetcH
Finesse the World
« When the fuck everybody become so friendly too, you know what I’m sayin’. I ain’t never been that friendly, my nigga, I ain’t never known the world to be that friendly, man. We’re no friends my nigga, I don’t really fuck with niggas like that man. When you see me my nigga don’t even approach me my nigga, I ain’t friendly like that » (« Product of da Block »).
RetcH peut se rassurer, le message est passé. Après écoute de Finesse The World, il faudrait être drôlement suicidaire pour aller taper sur l’épaule du rappeur du New Jersey. F.T.W. (l’abréviation met tout de suite au parfum quant au propos) est un brûlot de trente-six minutes, durant lesquelles Retchy P nous fait voyager dans un monde dystopique où tout tourne autour de la came et des armes. De sa voix éraillée le garçon crache ses rimes plus qu’il ne rappe, et s’est bien gardé de convier qui que ce soit au micro pour apporter un peu de variété et nous offrir une pause éventuelle dans ce déferlement de haine. Forcément, ça peut rebuter. Mais cela participe à l’identité très forte du projet.
« Finesse the World ne commence pas là où d’autres œuvres se sont arrêtées, bien au contraire. »
Car évidemment, pour essuyer les glaviots de RetcH, pas de samples d’eurodance ou de belles boucles de soul. Le rappeur a sollicité des producteurs de son entourage (Antwon Carrera, H.N.I.C., Thelonious Martin, etc.) pour fournir les supports adéquats, minimalistes et menaçants. Et vu le résultat, le casting a été plus qu’efficace. De la basse caverneuse de « Disclaimer » aux claviers inquiétants de « Still Wit’ it » en passant par la guitare vénéneuse de « Product of Da Block », la pression ne tombe jamais et la qualité non plus. On remarque également avec plaisir le souci du détail, à travers des éléments qui contribuent à rendre les instrumentaux encore plus anxiogènes, comme les voix déformées en fond sur « Disclaimer » ou le changement de beat à la fin de « Round Here ».
Il y a du Onyx époque All We Got Iz Us dans Finesse the World, pour le côté désespéré et la voix de RetcH qui rappelle un peu celle de Sticky Fingaz. Il y a du Clipse version Hell Fath No Fury, pour le rap de dealer sur productions squelettiques. Il y a du Mobb Deep, du Agallah, voire du Company Flow pour les ambiances glaciales… Les filiations sont multiples mais jamais trop évidentes. Finesse the World ne commence pas là où d’autres œuvres se sont arrêtées, bien au contraire. Malgré des affiliations glorieuses (Action Bronson et Alchemist, A$AP Mob, Lo-Lifes), RetcH a décidé de tracer sa propre voie, optant pour un registre plus rugueux que sur ses précédents projets, quitte à aller dans l’outrance pour se démarquer. Il n’arrive néanmoins pas seul : ses collègues Da$H et $ha Hef ont aussi sorti de bons projets cette année, appuyés par les mêmes beatmakers que ceux présents ici. Voilà une équipe qui pourrait bien usiner, en toute discrétion, le nouveau son de New York et de sa grande banlieue, à la fois fidèle à ses racines, actuel et terriblement efficace.
Pas de commentaire