Monsieur R
Mission R
Lire le titre de cet album à haute voix, avec son apostrophe, peut laisser imaginer un disque léger, peut-être amusant et connoté d’ébats sexuels… Il n’en est rien, et qui connaît son auteur, même de loin, le sait. Mission’R n’a rien à voir avec le kama sutra, les positions sont ici politiques. Dans la lignée d’Au Commencement et de Sachons Dire Non sortis les deux années d’avant, Monsieur R porte la parole des opprimés, des oubliés, sans grande finesse mais avec une volonté respectable. La mission qui est sienne est de faire résonner l’écho des voix qu’on n’entend pas. Sa voix à lui est marquante, elle vient du fond d’un corps qu’on imagine fort et puissant. Elle en impose, idéale pour exprimer les textes du leader du M à 3, puisqu’ils font la part belle à la révolution, sans grand effort didactique. Monsieur R est un meneur de troupes, pas un instituteur. Il va contre les colons, les missionnaires (les vrais), les héritiers des Lumières, les pilleurs, les maîtres du monde… Contre tout un système, sans ambiguïté, Monsieur R avec Mission’R est dans l’impulsion, l’action. Ce n’est pas toujours digeste, parfois maladroit (des instrumentaux un peu lourds, des chœurs dispensables, des refrains très datés) et force est de constater que vingt ans plus tard cet album n’est pas une partie de plaisir. Mais il est finalement à l’image des thèmes qui l’habitent, et le moins agréable n’est pas toujours le plus dispensable.