1998 et troisième disque en trois ans pour M’Group. Ce maxi CD de quatre pistes, dont un instrumental, réédite la combinaison avec Légadulabo. Freko et Cyanure, déjà convoqués sur Fidèle au rap en 1996, apparaissent pour la suite de « Rapide comme un serpent ». Le titre, hérité d’une phase du Dingo d’ATK, donne son nom à ce disque. Morceau egotrip, boucle angoissante, roue de l’infortune et détresse du temps qui passe sur un arpège de guitare mélancolique, telle est l’ambiance de ce quart d’heure dans lequel M’Group continue de serpenter dans le rap français tout en asseyant un peu plus son identité. La rime a la couleur noire et les couplets alternent entre aigreur, mélancolie du bas des blocs et saillies énergiques. C’est cette dernière que l’auditeur de l’époque retiendra le plus, avec la deuxième morsure de « Rapide comme un serpent ». Si le trio de Deuil-la-Barre pose ses couplets venimeux, c’est le jeu de pass-pass entre les deux gars du labo qui éclaire le morceau, dans l’esprit des titres découverts sur Micro Test, le premier disque d’ATK. Quant à M’Group, ils annonçaient dans la pochette de ce maxi et par l’intermédiaire de Dafré, leur producteur chez Kool et Radikal : « Si tout se passe bien, un album devrait enfin voir le jour », suivi d’un « On ne lâche pas l’affaire » tout en majuscule. Et si effectivement le groupe mené par Part 2 Djaka continuera à sortir des disques jusqu’en 2004, jamais un album de MG ne verra le jour. La relation entre MG et son label était moins au beau fixe qu’il le semblait.

Part 2 Djaka

(MC et fondateur de M’Group)

« J’envoyais des cassettes démo aux radios. C’était en 1993 ou 1994 et il y avait peu de rappeurs, notamment à Deuil-la-Barre d’où je viens. Kool & Radikal avait entendu la maquette, je ne sais plus s’ils l’ont entendue par diffusion ou par envoi. C’était la maquette de « Fidèle au rap ».  Ils nous ont contactés, nous ont invités à leur émission sur FPP et nous ont proposé de nous produire. On était à fond. Grâce à eux on avait la possibilité d’aller en studio, on ne faisait que ça, on avait plein de projets. Le disque qui nous a lancés, toute proportions gardées, c’est Tu Disais quoi ? en 1997. Quand on fait Deuxième Morsure, on reprend la phase de Freko qu’il avait lâchée sur le freestyle « Fidèle au rap » en 1996. On connaissait Légadulabo via l’émission de Kool & Radikal où beaucoup de groupes gravitaient. Dafré nous les avait présentés et ça s’est fait. Je voulais faire une production avec un refrain samplé et j’ai samplé ce qu’on avait fait ensemble deux ans plus tôt. C’était instinctif, je voulais que ce soit percutant. On ne se rendait pas forcément compte qu’on avait un côté très noir, de mecs qui ressassent. Quand Deuxième Morsure sort, on kiffe mais en même temps, on est déjà devant de grosses embûches. C’est un moment où on est déçus que Hakeem [Tunisiano, NDLR] soit parti. Tu disais quoi ? avait vraiment bien marché à notre petite échelle et le voir lui et Aketo partir, ça avait été dur. On voulait aussi sortir un album mais ça ne s’est jamais fait car il a commencé à y avoir de vrais conflits entre nous et Dafré de Kool & Radikal. Avec R.K.O, on a mis du temps à s’intéresser à autre chose qu’à la musique et quand on s’est rendus compte de tout ce qui déconnait, c’était trop tard. On se sentait bridés par Dafré, on n’avait pas les mêmes ambitions aussi. C’est dommage car pour l’époque, les deux versions de « Rapide comme un serpent », « Fidèle au rap » ou « Tu disais quoi ? » sont des sons qui avaient une petite importance. Aujourd’hui encore, je garde des bons souvenirs artistiques, moins de ce que j’ai vécu par contre. À l’époque, on espérait faire encore mieux, mais quand tu sors un titre, rapidement, il ne t’appartient plus. En tous cas, on était sollicités sur de nombreuses mixtapes, je pense que ça prouve qu’on marquait un petit peu les gens. Et malgré les problèmes avec Dafré, l’émission radio de Kool & Radikal nous a aidés à être visibles malgré tout. » – Propos recueillis par L’Abcdr du Son en décembre 2018.