Akhenaton - J'ai pas de face
Dans la grande campagne du rap français contre le rock, la dance, la variété française et autres genres jugés – à tort ou à raison – stupides voire décérébrants, « J’ai pas de face » d’Akhenaton constitue un morceau de choix. Sur un beat minimaliste orné du « cri de la hyène » de Morricone, produit par lui-même et Prince Charles Alexander, Chill lève un gros majeur à toute l’industrie du divertissement. Pas question de faire dans la dentelle ici, l’attaque est frontale et tout le monde en prend pour son grade : le producteur véreux bien sûr, mais aussi la potiche qui pousse la chansonnette dans la douleur, le Boys Band au nez poudreux et au corps bodybuildé, l’ado pré-pubère en pleine recherche de soi et même Danielle Gilbert qui a eu le malheur de passer par là. Chose rare dans le rap français, Akhenaton (friand de l’exercice, comme il le prouvera plus tard dans « C’est ça mon frère ») n’hésite pas à rentrer dans la peau des personnages qu’il démonte. C’est ainsi qu’il se métamorphose en Gamani, magnat de l’industrie du disque évidemment détestable au plus haut point, ne cherchant qu’à se faire des couilles en or sur le dos de ses poulains crédules, en dépit de tout bon goût et de toute recherche artistique. Et si « J’ai pas de face » demeure aujourd’hui un morceau important de sa discographie, ce n’est pas tant pour ce qu’il dénonce que pour sa manière d’annoncer, avec encore un peu d’humour, le Chill tourmenté, incompris et blessé de Sol Invictus, ce grand album sur le mensonge dans sa dimension la plus mystique.